Parution : Orwell a-t-il vu juste ?, Sillery, Presses de l'Université du Québec, 1986, p. 43-70.
Roger Tessier aborde 1984 sous l’angle de l’écologie naturelle et sociale. Dans la première partie de cet essai, il considère trois dimensions de l’environnement : la nature comme paysage et comme pourvoyeuse de ressources ; les environnements construits (architecture, aménagements urbains, technologie) ; les rapports sociaux. Il avance que l’absence relative d’attention au décor, naturel ou construit, dans le roman d’Orwell s’explique par le fait que l’environnement océanien se résume à peu près exclusivement à la présence oppressante et envahissante des autres.
Dans la deuxième partie, Tessier compare Océania aux écosystèmes naturels et conclut que cette société est anti-écologique. Son fonctionnement suppose la monovalence (la négation et la réduction des différences) alors que les écosystèmes naturels tirent précisément leur dynamisme et leur équilibre de ces différences. De plus, une société écologique recherche la suffisance et vise la satisfaction des besoins tandis que les citoyens océaniens doivent vivre dans des conditions de pénurie continuelle.
L’essayiste se demande enfin si 1984 peut laisser présager certaines tendances de la société nord-américaine. Même si les contacts avec la nature diminuent du fait que la population vit en forte majorité dans un contexte urbain et que la violence et la circulation routière qu’on y trouve éloignent l’homme de son environnement, Tessier estime que la société nord-américaine ne connaît pas les excès décrits dans 1984. Loin d’être menacée par l’envahissement des rapports sociaux et le manque d’intimité, notre société devrait plutôt se méfier de la privatisation et du mythe de l’autosuffisance individualiste, croit-il.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1986, Le Passeur, p. 171.