Parution : Solaris 100, Hull, 1992, p. 63-65.
Cet article se veut un prolongement des réflexions amorcées par Michel Lamontagne dans « Repérer les humains parmi les automates » sur l’œuvre de Daniel Sernine. Sur un mode impressionniste qui fait l’économie de démonstrations irréfutables basées sur une grille d’analyse éprouvée, il aborde quelques thèmes comme le temps, le monde inventé, l’amour homosexuel, la folie meurtrière, la guerre éternelle et la fascination du sang pour démontrer la singularité et l’audace du roman Chronoreg. Au sujet du temps, il dira que l’utilisation qu’en fait l’auteur – grâce à une drogue qui permet au personnage principal d’effectuer des retours dans le passé – n’est pas habituelle en science-fiction. « Le Temps use. Le Temps détruit. » Blackburn est une figure moderne du mythe de Sisyphe.
Plus loin, l’essayiste évoquera la figure d’Orphée descendant aux enfers quand Blackburn tente de ramener son amant Sébastien à la vie en retournant dans le passé. Ailleurs, il analyse la personnalité de Jac Marin, « une métaphore de l’écrivain », dont la folie meurtrière constitue un avertissement pour celui qui s’adonne au jeu de la littérature. Lamontagne estime que dans l’univers romanesque de Sernine mû par l’Histoire – un conflit entre le Québec et Terre-Neuve compose l’arrière-plan politique –, la Guerre qui y est représentée entretient davantage de liens avec le fantastique qu’avec la science-fiction – hantée traditionnellement par l’anéantissement final – car elle met en lumière un problème fondamental : celui du Mal. Et le sang ? Mac Orlan écrit : « Le sang est un excellent révélateur de la force inconnue qui travaille le crâne des idiots. »
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1992, Alire, p. 225.