Parution : Canadian Literature 53, Vancouver, University of British Columbia, 1972, p. 60-80.
Même si la majeure partie des contes québécois proviennent du folklore français, ils s’en distinguent par le contenu religieux qui les caractérise, affirme d’entrée de jeu Jean Rigault. En s’attardant surtout au merveilleux chrétien que l’on rencontre dans la plupart des récits, l’essayiste croit pouvoir mettre à nu l’âme québécoise en analysant les situations, les commentaires et les leçons de morale que renferment ces récits. À l’aide d’exemples tirés du corpus qui viennent étayer son étude, Rigault passe en revue les valeurs véhiculées par le conteur qu’on peut regrouper sous un seul vocable : la morale chrétienne. À tour de rôle donc, l’essayiste va épiloguer sur les valeurs suivantes : la priorité du divin sur l’humain, la charité, la résignation, le courage, la modestie (qui s’adresse surtout aux femmes), la fidélité, le « culte » des enfants, le respect des personnes, des objets et des gestes saints.
Dans la seconde partie de son essai, l’auteur sonde cette fois l’âme du pays – après celle du paysan canadien-français – en répertoriant les principales figures du conte au XIXe siècle qui fondent un monde où le naturel et le surnaturel se côtoient et se mêlent. Satan est sans contredit le héros du récit au Québec. Cependant, certaines créatures de la mythologie païenne d’origine européenne sont introduites dans le conte chrétien : les feux follets, les loups-garous, les lutins, les sorciers, les revenants. Le folklore indien a aussi fourni à la littérature orale québécoise quelques figures comme la jongleuse et le mahoumet.
En conclusion, Rigault estime que, malgré l’emprise de la foi et de la morale religieuse, le conte au Québec est assez optimiste et révèle chez le paysan « un tempérament à la fois actif et rêveur ».
Source : Janelle, Claude, Le XIXe siècle fantastique en Amérique française, Alire, p. 252-253.