Elaine Després

Parution : Le Roman des possibles : l'anticipation dans l'espace médiatique francophone (1860-1940), sous la direction de Claire Barel-Moisan et Jean-François Chassay, Montréal, Presses de l'Université de Montréal, coll. Cavales, 2019, p. 445-462.

La nouvelle « Une exploration polaire aux ruines de Paris » (1911) d’Octave Béliard émerge après un demi-siècle de fascination scientifique pour les comètes, le soleil et les ères glaciaires. Comme beaucoup d’autres auteurs d’anticipation à l’époque (Camille Flammarion, par exemple), Béliard est un scientifique (médecin). L’anticipation est une occasion pour lui de présenter au grand public (la nouvelle est publiée dans Lectures pour tous) des théories récentes, comme celle de l’évolution des astres, mais surtout d’en exploiter le potentiel imaginaire.

Imaginer la lente disparition de l’humanité par une ère glaciaire permet une réflexion sémiotique sur la fin des temps et sur ce qui permet de faire société : le commerce des signes (Eco). À travers le voyage d’explorateurs dignes de Verne sur les plaines glacées d’un futur lointain et jusqu’aux ruines de Paris que nous propose Béliard, il s’agira dans cette communication de montrer que la neige efface les signes et empêche leur production, elle atténue ou détourne, elle aplanit l’espace et le temps. La quête des ruines incarne à la fois une nostalgie pour une grandeur passée et le besoin de l’humain de donner un sens au présent à partir des signes du passé. [ED]