Parution : Systèmes humains, vol. 1, n˚ 3, Trois-Rivières, 1985, p. 65-71.
Jean-Marc Gouanvic situe d’abord l’utopie et la science-fiction par rapport aux autres genres littéraires. Il constate qu’elles « apparaissent comme des laboratoires d’une rare pertinence pour l’étude des discours sociaux en général et du discours sur le système familial en particulier ». Il analyse en détail la structure familiale dans L’Utopie (1516) de Thomas More et dans Défricheur de hammada (1952) de Guy-René de Plour. Dans un cas comme dans l’autre, Gouanvic démontre que la famille est le fondement même de ces sociétés utopiques. La base familiocratique est non seulement une entité administrative mais aussi un concept philosophique non interrogé qui permet aux auteurs d’asseoir « leur discours sur une axiomatique qui ne souffre pas de contestation ». La famille est en effet associée à l’idée de nature humaine immuable. Cependant, depuis une vingtaine d’années, les valeurs familiales traditionnelles sont remises en question. L’auteur note l’absence de « projets utopiques classiques qui répondent à un esprit de démonstrations ». Les utopies sont devenues interrogatives, ambiguës pour reprendre l’expression d’Ursula Le Guin, principale représentante de cet utopisme qui évoque un relativisme socio-historique conscient des problèmes sociaux graves.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1985, Le Passeur, p. 155-156.