Parution : Revue francophone de Louisiane, vol. III, n˚ 2, Lafayette (Louisiane), 1988, p. 25-31.
Rappelant que la science-fiction moderne est une « poétique de l’altérité », Jean-Marc Gouanvic se propose, dans cet essai, de vérifier si les auteurs québécois de SF s’intéressent aux diverses formes d’altérité, qu’il s’agisse d’altérité socio-historique ou d’altérité bio-écologique. Le théoricien regroupe sous le premier terme les catégories suivantes : la prospective, la mutation et la métamorphose, l’histoire alternative ou « uchronie » et l’utopie. Il trouve peu d’exemples de ces formes de récit dans la SF québécoise et le déplore. À part la thématique de la métamorphose abordée par Élisabeth Vonarburg et l’uchronie historico-géographique de Jean-Pierre April, « Canadian Dream », il doit se rendre à l’évidence que les auteurs québécois n’ont pas encore su exploiter les immenses ressources de l’altérité historique propres à la SF, et particulièrement à l’utopie.
Par ailleurs, l’essayiste estime que le motif de l’altérité bio-écologique, qui se caractérise surtout par sa dimension sensuelle et même libidinale tandis que l’altérité socio-historique fait davantage appel à la fonction cognitive et réflexive, est bien servi dans les textes d’Esther Rochon, de Michel Martin et d’Agnès Guitard. En somme, pour Gouanvic, la véritable science-fiction est porteuse d’une rupture épistémologique car elle « exprime un attrait centrifuge pour la différence ». L’avenir de la science-fiction au Québec est lié à la capacité des écrivains québécois à saisir l’importance de cette problématique, conclut-il.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 322.