Parution : Québec français 66, Sainte-Foy, 1987, p. 30-32 et 34.
Reprenant l’assertion d’André Belleau voulant que la nouvelle ait partie liée avec l’événement et qu’elle soit devenue « la forme quasi obligée de la littérature fantastique », Michel Lord ajoute que la nouvelle convient également aux autres esthétiques du discours narratif et que la conscience du héros demeure tout aussi importante que l’événement. Ce faisant, il introduit la notion de croyance (mythique ou rationnelle) de celui qui vit l’événement, croyance qui repose sur un savoir personnel ou social légitimant ou marginalisant le discours du personnage. Il vérifie cette hypothèse dans diverses formes du récit : le récit réaliste, la légende (folklorique), le conte merveilleux, le récit fantastique et le récit de science-fiction.
Il s’attarde à ces deux dernières et montre, exemples à l’appui, que l’événement autour duquel s’articule le récit n’a pas la même fonction en fantastique et en SF. En fantastique, l’événement introduit souvent une opposition violente entre deux univers, fait osciller la pensée des protagonistes entre la conscience réaliste et la conscience mythique ou merveilleuse, accule l’homme à la solitude, incapable qu’il est de prouver aux autres que l’anormal existe. En SF, l’événement renvoie à une forme de savoir qui a transformé le monde dans son ensemble tout en faisant appel au « paradigme absent » qui constitue une des caractéristiques de la SF. Michel Lord conclut en soulignant qu’en raison de sa brièveté, source d’images fulgurantes et d’idées elliptiques, « la nouvelle comporte toujours plus de mystère que de clarté ».
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 209.