Parution : Les Voies du fantastique québécois, Québec, CRELIQ, Nuit blanche éditeur, coll. Séminaire n˚ 3, 1990, p. 9-23.
Comme il l’avait fait dans Humour et fantastique : une analyse (1990), Georges Desmeules utilise un texte de Michel Bélil, cette fois-ci « Miroir-miroir-dis-moi-qui-est-le-plus-beau », pour démontrer que le comique et le fantastique ont en commun plusieurs procédés et que leur construction peut se superposer. Dans un premier temps, l’auteur répertorie les apparitions du fantastique dans le texte et rapporte les réactions du personnage principal à ces manifestations. Puis, il met ces éléments en relation avec le comique en prenant soin, au préalable, d’exposer le mécanisme de fonctionnement de l’humour en s’inspirant des travaux théoriques de Denise Jardon. « L’humour procède d’un phénomène économique double : une économie d’angoisse et une économie de la représentation du réel. » En outre, il repose sur deux phases essentielles : le paradoxe ironique (phase critique obligatoirement intellectuelle) et le rebondissement humoristique (essentiellement langagier).
Dans son analyse du texte de Bélil, Georges Desmeules relève deux modèles de situations comiques, la « répétition de situations » et le « pantin à ficelles » (le narrateur, jouet de son oncle et du miroir), qui lui confèrent un potentiel comique. Il poursuit sa démonstration en donnant des exemples qui témoignent de l’utilisation par Bélil de précédés humoristiques. Ainsi le paradoxe ironique s’incarne dans la situation du protagoniste (manipulateur manipulé) tandis que le rebondissement humoristique est assuré par des remarques au contenu parodique évident (allusion aux « stupides films d’horreur », à Blanche-Neige, à la courtisanerie). Desmeules conclut en rappelant la théorie de H.P. Grice sur le principe de coopération qui corrobore sa thèse. Celui-ci affirme que toute communication doit remplir quatre conditions pour être réussie. Or, l’humour transgresse les règles de quantité (l’humoriste doit laisser entendre plus que ce qu’il dit) et de modalité (il doit être ambigu pour réussir son effet). Le fantastique n’agit pas autrement pour atteindre le lecteur. Sauf qu’on rit de l’humour, mais non du fantastique ! Pourquoi ? Une question de distanciation, croit Desmeules.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1991, Logiques/Le Passeur, p. 192-193.