Parution : Solaris 129, Proulxville, 1999, p. 21-26.
Michel Lamontagne analyse ici les deux premiers recueils de contes fantastiques de Daniel Sernine parus en 1979, Les Contes de l’ombre et Légendes du vieux manoir. Il s’attache à démontrer que la critique officielle, en s’empressant de classer ces textes dans le fantastique gothique, a occulté leur modernité et leur originalité. Lamontagne relève le renversement de valeurs qui s’opère dans le fantastique de Sernine alors que la maison (et, par extension, la tour, le manoir, l’église), qui évoque normalement la famille, la chaleur et la sécurité, se voit investie du « statut de zone sacrificielle où l’humain est égorgé sur l’autel de l’indifférence, de la haine et de la défaite ».
Métaphore du corps, la maison sert de lieu de rencontre entre le conteur et la voix de l’Ombre que celui-ci peut percevoir comme un double fantastique. Lamontagne s’emploie par la suite à définir les territoires de l’Ombre : 1) la nuit, territoire de tous les mystères ; 2) la mort, territoire du silence et du sacré ; 3) le mal, territoire de tous les combats. Ce faisant, il montre en quoi le fantastique de Sernine, qui cherche autant, par la qualité de l’écriture et l’importance qu’il accorde au regard, à créer un effet esthétique qu’à provoquer l’épouvante chez ses lecteurs possède sa spécificité propre tout en puisant dans la tradition du gothique dont il maîtrise les codes.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1999, Alire, p. 191.