Parution : Visions d'autres mondes, Ottawa, RD/Bibliothèque nationale du Canada, 1995, p. 54-68.
Traduction : Science Fiction in francophone Canada (1839-1989), dans Out of this world, Kingston/Ottawa, Quarry Press/National Library of Canada, 1995, p. 51-65.
Jean-Louis Trudel est bien conscient du caractère anachronique du terme « science-fiction » quand il est question de fictions conjecturales avant 1930. Avec les mises en garde idoines, il fait un inventaire exhaustif des œuvres qui peuvent rétroactivement relever de ce genre, de « Mon voyage à la lune » (1839) de Napoléon Aubin à Défricheur de hammada (1953) d’Armand Grenier publié sous le pseudonyme de Guy René de Plour. Cette première époque se distingue par quelques traits caractéristiques : la tentation utopique, la réflexion philosophique, le discours propagandiste et l’aventure.
La seconde époque, comprise entre 1953 et 1974, est marquée par la Révolution tranquille dont les effets se font aussi sentir en littérature. L’anticipation technoscientifique n’y est pas encore très affirmée mais l’anticipation sociale ou politique donne naissance à des œuvres projetant l’image d’un Québec puissant, voire indépendant, et où se pointe le scénario de la rédemption nationale.
La dernière période (1974-1989) voit la prolifération des œuvres et la multiplication des actions structurantes (revues, colloques, prix, collections) visant à canaliser le bouillonnement créatif d’une nouvelle génération d’écrivains qui se consacrent à leur mode littéraire de prédilection : la science-fiction. Un « milieu » va se constituer, que Trudel voit comme « une greffe américaine ou européenne », alors qu’un courant parallèle se développe, alimenté par des écrivains fréquentant occasionnellement le genre. À propos de ce courant, Trudel affirme que « d’une certaine façon, ce sont les auteurs les plus authentiquement enracinés au Canada ». Il voit dans la littérature jeunesse, que les écrivains du milieu ont investie au cours des années 1980, la clé de la réussite de la transplantation de la greffe car c’est là que se forment les lecteurs de demain.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1995, Alire, p. 224-225.