Parution : Solaris 131, Proulxville, 1999, p. 33-40.
Afin de retracer les premières manifestations de la science-fiction au Canada français, Jean-Louis Trudel scrute le champ du feuilleton et de la littérature en fascicules qui a fait l’objet de nombreuses recherches universitaires depuis une vingtaine d’années. Mais auparavant, il examine la production des éditions Édouard Garand qui ont publié trois romans de proto-SF marginale entre 1926 et 1931. Il faut ensuite attendre 1949 pour que la science-fiction suscite une série autonome dans les pulps québécois. Cette année-là, deux séries voient le jour, Les Aventures futuristes de deux savants canadiens-français et Les Aventures diaboliques de Rapax 2, mais elles seront vite interrompues. « Par la suite, la SF n’apparaît dans la littérature en fascicules que sous la forme d’enclaves ou d’incursions ponctuelles », remarque Trudel. Le cas d’enclave le plus connu est celui des Aventures étranges de l’agent IXE-13, l’as des espions canadiens qui compte 18 épisodes (numéros 650 à 667) qui se déroulent dans l’espace.
Malheureusement, la littérature en fascicules est en perte de vitesse au début des années 1960 en raison des changements socioculturels que connaît alors le Québec. La SF, qui commençait à émerger dans ce champ littéraire après l’essoufflement des autres genres (espionnage, aventures sentimentales, western, policier), sera récupérée par la littérature jeunesse au cours de cette décennie. Trudel explique en partie l’échec de la SF avant 1960 par les contraintes de production inhérentes à la littérature en fascicules. Il rappelle qu’elle est un produit de grande consommation et qu’elle s’accommode mal du renouvellement de la mise en scène qu’exige souvent la science-fiction. En empruntant des tropes assez connus qui nécessitent un minimum d’explications et en réduisant la spécificité de la SF à des gadgets, les auteurs ont produit une science-fiction qui ne brille guère par son originalité thématique.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1999, Alire, p. 197.