Parution : imagine… 49, Montréal, 1989, p. 51-56.
Jean-Marc Gouanvic conteste l’utilisation de l’expression science-fiction québécoise pour désigner des textes parus avant le milieu des années 1970 comme le font certains commentateurs de la SF au Québec, nommément Michel Lord dans l’introduction de son Anthologie de la science-fiction québécoise contemporaine parue chez Bibliothèque québécoise (BQ). Il estime que cette annexion a posteriori va à l’encontre des lois de la connaissance historique. Comment parler de « science-fiction » pour des textes antérieurs à la fin des années 1920 quand le concept de « science-fiction » n’existe pas encore ? Comment parler encore de « science-fiction québécoise » pour des textes de Thériault ou de Jean Tétreau quand ce concept est totalement impensable avant 1974 ?
Pour Gouanvic, cela supposerait une continuité historique et la constitution d’une tradition. Or, il affirme qu’il y a rupture complète entre les choix éditoriaux de Requiem et les œuvres de Thériault, Tétreau, Corriveau et Martel parues avant la naissance de cette revue et qu’une tradition suppose des auteurs, un fandom et une structure éditoriale pour qu’elle existe. Il faut regarder, dit-il, du côté de la SF américaine pour trouver une filiation dans l’œuvre des auteurs québécois de SF qui ont émergé depuis quinze ans. Enfin, il craint que l’attitude de Michel Lord et des autres théoriciens qui tiennent le même discours conduise à une dissolution du genre dans l’ensemble des productions littéraires, plaçant ainsi les auteurs dans l’impossibilité de réaliser le potentiel de la SF et de soutenir sa modernité.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 236-237.