Parution : Nous les Martiens 22, Paris (France), 1992, p. 49-56.
Signée comme il se doit d’un pseudonyme-anagramme – Isabel Gavra-Bourthes –, l’étude d’Élisabeth Vonarburg aborde sur un ton ludique la question du pastiche et de la parodie dans la science-fiction. L’auteure note que les néologismes constituent une bonne source de « distanciation cognitive », mode privilégié de la SF. Ils peuvent aussi nourrir un plaisir de lecture qui s’apparente selon elle au déguisement, à la parodie. L’utilisation du néologisme relève de l’exolinguistique qui peut aller jusqu’à la création de langues entières. Il s’ensuit, sur le plan narratif aussi bien que diégétique « une réflexion parfois très approfondie sur les racines du langage et du sens, et la façon dont le langage modèle la réalité ». Elle donne comme exemple La Main gauche de la nuit d’Ursula Le Guin et Les Langages de Pao de Jack Vance dont la stratégie de distanciation repose sur l’exolinguistique.
La parodie peut s’exercer aussi au détriment de la méthode scientifique quand des écrivains comme Isaac Asimov et Frank Herbert ont recours aux exergues ou Textes-de-Référence inventés de toutes pièces. Mais l’exemple le plus grandiose demeure le roman de Stanislas Lem, Solaris, qui propose rien de moins qu’un pastiche de toutes les sciences, de la Connaissance elle-même et de ses méthodes. Et que dire de son ouvrage intitulé A Perfect Vacuum composé d’essais critiques sur des livres imaginaires dont elle donne un aperçu des multiples jeux de miroirs où il devient de plus en plus difficile de distinguer le réel de l’inventé. Mais, rappelle-t-elle, « toute parodie suppose l’usage d’un code, commun à l’émetteur et au récepteur. [...] Si le code n’est pas connu, il n’y a aucun moyen de reconnaître pastiche et parodie. »
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1992, Alire, p. 236.