Parution : Cahiers de l'Association des professeurs de français des universités et collèges canadiens (APFUCC), Victoria, 1989, p. 76-89.
Présentée en mai 1988, à Windsor, dans le cadre du congrès des Sociétés savantes, cette étude prolonge en quelque sorte l’essai publié dans la Revue francophone de Louisiane. Convaincu que l’espace-temps est au centre de la poétique de la science-fiction et constitue sa spécificité générique, Gouanvic s’applique à démontrer que le traitement par la SF de l’espace-temps évoque une altérité authentique, cette altérité étant bio-écologique et historique. Il rappelle que les théories de Darwin et d’Einstein notamment, sur les conceptions de l’homme et sa place dans le cosmos, ont fait subir à la SF une mutation générique profonde.
La reconnaissance de l’effet de la science sur la société, qui date de la fin du XVIIIe siècle, va amener l’être humain à s’intéresser à l’avenir social. Contrairement au roman réaliste qui « médiatise les problèmes de l’historicité par le moyen d’une conscience individuelle », la SF prend en charge des destins collectifs et thématise les déterminismes socio-historiques, ceux du passé (par l’uchronie) tout autant que ceux du futur (par l’utopie, le voyage temporel et l’anticipation).
Gouanvic utilise une nouvelle de Jean-François Somcynsky, « Voyage du petit homme », publiée dans le recueil Les Grimaces, pour illustrer comment la critique sociale et la problématique véritablement collective s’inscrivent dans l’axiomatique d’altérité socio-historique, héritière du grand courant de l’utopie morienne. Pour l’essayiste, le traitement des mythes, lorsque le récit n’en remet pas en question le schéma, constitue une négation de l’altérité socio-historique. Quant à l’altérité bio-écologique, Gouanvic estime que sa principale représentante au Québec est Agnès Guitard dont la nouvelle « Coineraine » se distingue par sa création lexicale, laquelle contribue à amplifier l’effet de paradigme absent.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 237-238.