Parution : imagine… 31, Montréal, 1985, p. 8-17.
Posant d’entrée de jeu que l’utopie « peut être adéquatement décrite comme une ascendante de la science-fiction moderne », Jean-Marc Gouanvic se propose de faire une analyse de ce genre littéraire dans la production française au Canada. Il centre son étude sur Défricheur de hammada (1952) de Guy-René de Plour, considérant ce récit comme une œuvre charnière. Les romans qui le précèdent s’inspirent du nationalisme d’alors qui repose sur la défense de la langue française et de la religion catholique. Pour la patrie (1895) de Jules-Paul Tardivel, quoiqu’il s’agisse d’une utopie minimale, consacre le triomphe de l’ultramontanisme. La Cité dans les fers (1925) d’Ubald Paquin, tout en partant d’une problématique identique, fait contrepoint à l’idéologie théocratique de Tardivel en raison de son pessimisme historique. Toutefois, c’est avec le récit de de Plour que l’utopie s’offre vraiment comme une contre-proposition historique en actualisant son internationalisme. En outre, ce récit tente de concilier des positions qui s’excluent et reflète les bouleversements idéologiques survenus au Québec au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale.
Après ce récit, l’utopisme qu’on retrouve dans la SF québécoise est inspiré de la SF américaine. Les Tours de Babylone (1972) de Maurice Gagnon en témoigne tout comme l’érotopie de Jean-François Somcynsky, Le Diable du Mahani, en partie héritière des idéologies de la contre-culture. Jean-Marc Gouanvic cite donc neuf textes qui contiennent, soit une proposition, soit un appel utopique. Il constate enfin que les auteurs de SF d’aujourd’hui sont incapables de proposer des utopies modernes.
Source : Janelle, Claude, L'ASFFQ 1985, Le Passeur, p. 156-157.