Parution : Images féministes du futur, Les Cahiers du Grad 6, Sainte-Foy, Université Laval, 1992, p. 7-35.
Rappelant l’accueil en général très favorable que la critique a réservé à ce roman, l’auteur soutient que c’est en le considérant comme une utopie qu’on peut le mieux comprendre sa portée. La première partie, « Du roman à l’utopie », présente L’Euguélionne comme un roman « idéique », c’est-à-dire mettant l’accent sur les idées des personnages plutôt que sur leurs actions ou leurs caractéristiques psychologiques, plus précisément comme un roman idéique utopique, c’est-à-dire « qui a pour thème une société idéalisée » (p. 12), et encore plus précisément comme un roman utopique féministe. Cependant, même si l’immense majorité des utopies s’inscrivent dans le cadre de la science-fiction, l’auteur montre que celle de Bersianik relève plutôt de la fantaisie, comme Animal Farm (Orwell) et Archaos ou le jardin étincelant (Rochefort).
La seconde partie commence par poser certaines définitions : « Si l’utopie est la manifestation du thème sociopolitique idéalisé dans le domaine de la fiction, ou peut appeler para-utopie la préoccupation pour le même thème dans le domaine théorique, et hétéropolitique la problématique commune à l’utopie et à la para-utopie » (p. 17). Après avoir mis en évidence la dimension hétéropolitique de la pensée de Bersianik, qui réclame l’avènement d’une nouvelle culture, l’auteur suggère que cet avènement présuppose la prise de conscience de l’exil vécu par les femmes, et que l’Euguélionne contribue à cette prise de conscience en dévoilant le caractère dystopique de la société patriarcale. Mais, au-delà de cette dénonciation, le roman présente aussi, de manière inchoative, une eutopie androgyne porteuse d’espoir.
Source : Bouchard, Guy, L'ASFFQ 1992, Alire, p. 220-221.