Mémoire de maîtrise, Université du Québec à Montréal, 2013, 119 pages.
Résumé
À partir de trois fictions politiques d'anticipation, issues de la littérature contemporaine française, ce travail de réflexion vise à mettre en lumière une poétique de l'histoire qui affirme, au-delà de certaines représentations dystopiques, la survivance du projet moderne d'émancipation. Dans Warax de Pavel Hak, Et je dirai au monde toute la haine qu'il m'inspire de Marc Villemain et Dondog d'Antoine Volodine, on retrouve des régimes autoritaires qui fondent leur domination sur l'abolition de toute altérité sociale et historique. En revanche, les protagonistes de ces romans, confinés dans les marges de ces sociétés systémiques, persistent à conserver une expérience du temps et de l'histoire qui, en ravivant l'historicité du passé, ouvre l'horizon d'attente de l'avenir. Désarticulés de toute forme de reconnaissance sociale, les personnages mis en scène dans les textes de Hak, Villemain et Volodine sont regroupés en « communautés de la survie » qui, bien qu'elles peinent à croire à des lendemains radieux, représentent une trace inversée de la pensée utopique.
C'est donc parce que ces œuvres racontent l'histoire de vaincus qui refusent de consentir à la défaite, qu'elles mettent en relief la persistance du lourd héritage culturel des utopies déchues de la modernité, de façon à problématiser les rapports existants entre les espérances d'hier et les déceptions anticipées de demain. Et s'il est vrai que les thématiques de la « fin » ouvrent sur ce qui a été et sur ce qui sera plutôt qu'elles ne marquent un terme, il faut observer que les fictions à l'étude évoquent et participent à la mutation contemporaine de la pensée politique et de son imaginaire historique. Dans ce contexte, la résistance des communautés de la survie du corpus historicise et politise la « fin » en lui assignant un avenir qui, bien qu'incertain, redonne une actualité aux espérances du passé.
Table des matières
Remerciements ii
Résumé v
INTRODUCTION 1
CHAPITRE 1 : HÉRITAGES. VERS UNE DÉFINITION DE LA FICTION POLITIQUE D'ANTICIPATION COMTEMPORAINE 7
1.1. Généricité littéraire 8
1.1.1. Le genre utopique 10
1.1.2. Le genre dystopique 16
1.2. Les fictions politiques d'anticipation du corpus d'étude 23
1.2.1. Warax, de Pavel Hak 23
1.2.2. Et je dirai au monde toute la haine qu'il m'inspire, de Marc Villemain 26
1.2.3. Dondog, d'Antoine Volodine 30
1.3. Définition et caractéristiques 33
CHAPITRE 2 : HISTORICITÉS. EXPÉRIENCES DU TEMPS DANS LA FICTION POLITIQUE
D' ANTICIPATION CONTEMPORAINE 37
2.1. Mémoire du passé, anticipation et historicisation du présent 37
2.2. Champ d'expérience, horizon d'attente et régimes d'historicité 46
2.3. Des historicités conflictuelles 52
2.3.1. Le passé aboli dans Warax, de Pavel Hak 53
2.3.2. Les espérances d'hier dans Et je dirai au monde toute la haine qu'il m'inspire, de Marc Villemain 57
2.3.3. Les ruines de la mémoire dans Dondog, d'Antoine Volodine 63
CHAPITRE 3 : POLITIQUES. LES ENJEUX DE « L'APRÈS » DANS LA FICTION POLITIQUE D'ANTICIPATION CONTEMPORAINE 71
3.1. Un renouveau de l'engagement littéraire ? 73
3.1.1. L'âge d'or de l'engagement littéraire 74
3.1.2. Résistance de l'engagement littéraire contemporain 79
3.2. La fabulation de l'histoire 82
3.2.1. Mises en scène de la « fin » 84
3.2.2. Historicité et politique 90
3.3. Au-delà de la « fin » : les communautés de la survie 92
3.3.1. Les « sans-part » dans Warax de Pavel Hak 95
3.3.2. Les parias dans Et je dirai au monde toute la haine qu'il m'inspire de Marc Villemain 98
3.3.3. Les prisonniers non-repentis dans Dondog d'Antoine Volodine 103
CONCLUSION 109
Bibliographie 115