Mémoire de maîtrise, Université de Sherbrooke, 1972, 234 pages.
Résumé
L'œuvre de Maupassant éveille d'abord la curiosité ; le lecteur se croit parfois transporté au siècle de l'incrédulité religieuse alors que les penseurs délaissaient la logique de la raison pour s'attacher aux mirages des chimères les plus absurdes. On pourrait essayer de découvrir les relents prodigieux des sciences occultes si une intuition plus profonde et plus vaste de l'œuvre ne faisait pressentir un autre centre d'intérêt ; l'être lui-même dont la nature tiendrait du fantastique parce que la lucidité de son esprit entrevoit des espaces mystérieux, des espaces qui ne sont plus occupés par l'homme.
Maupassant nous surprend ensuite autant par son avidité à vouloir tout saisir de la réalité qu'il fouille jusque dans ses recoins les plus secrets que par son ambition démesurée à découvrir un monde nouveau où se croise l'illogisme de la vie avec la logique de la pensée. De plus, les contes et nouvelles suscitent l'intérêt du lecteur moderne parce qu'ils décrivent des états identiques à la démence psychédélique de la jeunesse du XXe siècle. Connaître plus profondément l'univers de ces courts récits consiste à faire l'expérience d'un Maupassant non encore exploité ; d'un univers intérieur dont il est difficile d'évaluer l'espace et le temps ; d'un style au-delà du style.
Repérer l'être et ses dimensions intérieures revient à poser les questions fondamentales de l'existence spatiale. Chaque personnage des contes pose une interrogation qui crée une distance entre l'être qui veut être idéalement et l'être qui vit. Un vide se creuse entre le raisonnable et la réalité concrète. Le phénomène de la distanciation s'accentue intensément quand l'écrivain décrit la précarité des facultés humaines et la conscience aiguë de la néantisation de l'activité intellectuelle. Toutes les questions sur l'Invisible et l'extra-terrestre posent des vides au lieu de combler la distance entre ce à quoi adhère l'esprit et ce que l'imagination entrevoit.
On est étonné alors par la densité imaginaire du contenu. Maupassant exploite l'inconscient dans ses manifestations les plus diverses comme les plus universelles ; il veut franchir toutes les distances de l'univers onirique, découvrir un temps et un être nouveau. On est étonné aussi par la fulgurance du récit, le timbre grave et léger de l'auteur ; et cette indicible impression d'ambivalence du fantastique en quête d'un au-delà du temps psychique. [Extrait de l'introduction]
Table des matières
INTRODUCTION 1
PREMIÈRE PARTIE : FANTASTIQUE ET MÉTAPHYSIQUE
CHAPITRE 1 : L'ÊTRE FANTASTIQUE 9
1. Notions générales 9
2. Caractéristiques du personnage ou de l'être fantastique 14
3. Dislocation de l'être fantastique 18
DEUXIÈME PARTIE : LE FANTASTIQUE ET L'IMAGINAIRE
CHAPITRE 2 : LE RÊVE ET LA PERCEPTION 29
1. L'imagination dynamique et matérielle 29
2. L'imagination et la conscience 32
3. L'imagination et les sensations 38
4. L'imagination et ses métamorphoses 41
5. L'imagination et la rapide cinématique de ses images 47
CHAPITRE 3 : LE RÊVE ET LA SENSIBILITÉ 51
1. Le gigantisme émotionnel 52
2. Temporalité et vision cosmique 61
3. Imagination dynamique et inversion spatiale 71
CHAPITRE 4 : LE RÊVE ET L'INQUIÉTUDE 76
1. Vision étrange et mystère 76
CHAPITRE 5 : LE RÊVE ET LE MORBIDE 87
1. Atmosphère dégoûtante 88
2. États de déchaînements 91
3. Crudité de la description de la mort 95
CHAPITRE 6 : LE RÊVE ET LES ÉTATS PSYCHIQUES 102
1. L'obsession 102
2. L'hallucination 110
TROISIÈME PARTIE : LE LANGAGE FANTASTIQUE
CHAPITRE 7 : L'IRONIE 139
1. La création humoristique 139
CHAPITRE 8 : PROCÉDÉS FANTASTIQUES 162
1. Le cynisme 162
2. Le sadisme 168
CHAPITRE 9 : LE SYMBOLE ET LE MOI FANTASTIQUE 178
1. Le cercle fantal 179
2. Le cercle fatal et la mort 197
CONCLUSION 206
Bibliographie 213
Index des contes cités 220
Index des noms propres 223
Index des auteurs cités 227
Index des illustrations (tableaux) 228
Table analytique des matières 229