Pierre-Alexandre Bonin

Thèse de doctorat. Université du Québec à Montréal, 2013, 314 pages,

Résumé
Stephen King est l'un des écrivains de littérature de genres les plus connus, et les plus prolifiques. Depuis les années 1980, son œuvre intéresse la critique universitaire et d'innombrables analyses ont été faites à son sujet. Pourtant, il y a une problématique qui n'a que trop rarement été étudiée : celle du lecteur, et par association, de la lecture. Ce sont ces questions que nous souhaitons aborder au cours de cette thèse, et ce, à travers deux axes principaux.

Le premier est celui du lecteur, et plus précisément de la figure du Fidèle Lecteur. En plus d'apparaître régulièrement dans le paratexte kingsien, le Fidèle Lecteur nous permettrait de présenter un lecteur mitoyen entre deux figures traditionnelles souvent associées à King, soit celles du lecteur « frivole », qui lit pour son plaisir ; et le lecteur « sérieux », à la recherche d'un deuxième degré et d'une critique sociale dans l'œuvre de King. Afin de nous aider à définir cette figure, nous nous baserons sur les régies de lecture telles que proposées par Bertrand Gervais, puisqu'il nous semble que le Fidèle Lecteur émerge à la jonction entre une lecture-en-progression, axée, comme son nom l'indique, sur la progression à travers le récit ; et une lecture-en-compréhension, où le lecteur tente d'épuiser le plus d'inférences possibles dans un texte donné. Le deuxième axe que nous souhaitons aborder est celui des stratégies métafictionnelles mises en place par King dans son œuvre. Nous souhaitons à la fois mettre de l'avant ces stratégies textuelles particulières, mais aussi mettre à l'épreuve notre figure en la plaçant face à une problématique centrée sur le lecteur. Outre la métafiction, nous aborderons également ce qu'il convient d'appeler « métapop » et qui correspond à une métafiction de la culture populaire dont King est l'un des principaux artisans.

Puisque l'œuvre kingsienne est immense, nous avons choisi de restreindre notre corpus au cycle de The Dark Tower, une série de huit volumes, publiés entre 1974 et 2012. En plus d'être terminée, cette œuvre est l'une des moins étudiées de King, ce qui nous permettra une plus grande liberté d'analyse. C'est donc à travers un corpus précis, mais foisonnant que nous ferons intervenir nos deux axes d'analyse, afin d'en arriver à une meilleure compréhension des stratégies textuelles de King, mais également de la place du lecteur (et particulièrement du Fidèle Lecteur) dans son œuvre.

Table des matières
Résumé vii
INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : DES FIGURES DU LECTEUR AU FIDÈLE LECTEUR : PERSPECTIVES THÉORIQUES 13
1.1 Une approche théorique des figures du lecteur 14
1.2 Pour une lecture sérielle de la figure du lecteur 30
1.3 Vers une figure du Fidèle Lecteur 44
1.4 Du lecteur fabulé au lecteur réel, le cas du paratexte kingsien 51
1.5 Profession : Fidèle Lecteur 60

CHAPITRE 2 : AU-DELÀ DU SIMPLE LECTEUR : LA FIGURE DU FIDÈLE LECTEUR DANS THE DARK TOWER 65
2.1 Entre consommation et dévotion : lecture extensive et lecture intensive 66
2.1.1 Consommer Stephen King : un rapport économique et/ou alimentaire ? 69
2.2 De lecteur à Fidèle Lecteur : lecture extensive et intensive dans The Dark Tower 73
2.2.1 Ka, dinh, can-toi : xénoencyclopédie et lecture extensive 75
2.2.2 Une impression de déjà-lu : Fidèle Lecteur, intertextualité et transfictionnalité 83
2.2.3 Je ne vous ai pas déjà lu quelque part ? Intertextualité, autoréférentialité et lecture extensive 89
2.2.4 Vous me rappelez quelqu'un : les personnages récurrents dans The Dark Tower 106
2.2.5 Pourtant, je suis sûr qu'ils en ont déjà parlé : lecteur et inférences erronées 118
2.3 « Cher Fidèle Lecteur » : la figure du lecteur dans le paratexte 126

CHAPITRE 3 : MÉTAFICTION ET MÉTAPOP : ÉLÉMENTS DE DÉFINITION 134
3.1 Quand la fiction parle d'elle-même : qu'est-ce que la métafiction ? 134
3.2 Waugh et la métafiction : une incertitude ontologique 136
3.3 Du langage à la narration, la métafiction chez Hutcheon 142
3.4 Quand le texte s'impose au lecteur : la métafiction selon Ommundsen 148
3.5 Métafiction ou métatextualité ? Stratégies et manifestations 153
3.6 Culture populaire et autoréférentialité : vous avez dit métapop ? 158
3.6.1 Le « pop » de métapop : culture populaire, précisions méthodologiques 159
3.6.2 La métapop : une métafiction des genres 165
3.6.3 D'une « méta » à l'autre : points de comparaison 169

CHAPITRE 4 : LE HALL AUX MIROIRS : MÉTAFICTION ET MÉTAPOP DANS THE DARK TOWER 173
4.1 Assumée ou sous-entendue ? Utilisation de la métafiction dans The Dark Tower 174
4.1.1 Ceci n'est pas un roman fantastique : mise en crise des codes et parodies des conventions littéraires 177
4.1.2 The Dark Tower, récit gigogne ? Jeux jubilatoires sur les franchissements de niveaux narratifs 184
4.1.3 Auteur, lecteur, narrateur, narrataire : qui fait quoi ? Jeu entre narrateur et narrataire 189
4.1.4 Vous êtes ici... ou ici... ou là... ou encore là-bas... Création de mondes alternatifs pour aboutir à la déréalisation 198
4.1.5 Ceci est un roman fantastico-postapocalyptique-western-science-fictionnel ! Saturation des formes et des structures jusqu'au vertige 208
4.1.6 Avec la participation de S. Jackson, T. S. Eliott, F. L. Baum et al. Mobilisation massive du réseau intertextuel 212
4.1.7 Stephen King, écrivain. The Dark Tower, œuvre de fiction. Dénudation de l'artifice du mystère de la littérature et refus d'escamoter l'illusion 216
4.2 Quand la culture populaire se met en scène : la métapop dans The Dark Tower 223
4.2.1. Quand la culture populaire devient métapop : prise de conscience et influences 224
4.2.2. De métapop à corpus métakingsien : King et son œuvre comme artéfacts populaires 231

CHAPITRE 5 : D'ANNIE WILKES AU FIDÈLE LECTEUR : STEPHEN KING, L'ÉCRITURE ET SON LECTEUR 243
5.1 The Dark Tower's « number one fan »: d'Annie Wilkes au Fidèle Lecteur 244
5.2 Insomnia et Black House : romans à part entière, ou appendices de The Dark Tower ? 252
5.3 De Shéhérazade à Pirandello : le rapport de King à l'écriture 267
5.4 Cette fois, c'est la bonne ! The Gunslinger, King et la réécriture, quels enjeux ? 278
5.5 C'était pourtant évident ! La relecture dans The Dark Tower 291

CONCLUSION 303
Bibliographie 310