À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Trois étudiants de l’école royale militaire de Kingston sont choisis pour voler à bord d’une fusée canado-américaine : Pierre Dumas, Renaud Martin et Angus McPherson. Lancée d’une base près de Fort Churchill, l’Astra 1 a pour destination la Lune. Cependant, le lancement tourne mal : les deux premiers étages de la fusée sont largués d’un seul bloc et les trois astronautes perdent connaissance.
Lorsqu’ils se réveillent, leur appareil s’est posé quelque part, en pleine brume. Sont-ils arrivés sur Vénus ? Non, ils sont en Sibérie. Tandis que Pierre et Angus partent explorer les environs avec leurs ceintures volantes, Renaud répare la radio, mais ses premiers appels suscitent une réponse des Soviétiques. Ceux-ci viennent cueillir au nid l’astronaute, qui a eu le temps d’avertir ses compagnons.
Pierre et Angus tombent sur un site de lancement de missiles dont les rampes sont camouflées par des hangars anonymes. Surpris par des inspecteurs au moment où ils sont en train de saboter les rampes, ils parviennent à tuer les deux Soviétiques, à se vêtir de leurs uniformes et à s’emparer de leur véhicule. Pendant ce temps, un savant allemand au service des Soviétiques explique à Renaud comment il a fait pour détourner la fusée par radio grâce aux secrets coulés par la femme de son frère, qui est le chef technique de la base canadienne.
L’intervention de Pierre et Angus permet à Renaud de s’évader en leur compagnie à bord de l’Astra 1, juchée par les Soviétiques sur une fusée de leur fabrication. Il ne leur reste plus qu’à revenir à leur point de départ, où ils sont accueillis en triomphe par tout le Canada. Un nouveau voyage vers la Lune se prépare, à bord de ce qui sera l’Astra II.
Commentaires
Lorsqu’il est paru, ce roman était la troisième œuvre canadienne-française en trois ans à raconter des voyages spatiaux et à évoquer par la bande la conquête spatiale. En 1960, l’agent IXE-13 de Pierre Daignault, alias Saurel, avait passé plusieurs épisodes à se promener dans l’espace avec ses fidèles compagnons, naufragés du vide à la suite d’une avarie de leur fusée, Pionnier I. En 1961, Vénus via Atlantide de Guy Bouchard avait raconté les aventures spatiales de trois pilotes d’essai et apprentis astronautes.
Ce roman pour jeunes de 9 à 13 ans, signé par Jacques Sainte-Marie, est plus sérieux que les deux autres, même s’il semble combiner quelques éléments de ses prédécesseurs (le sabotage du Pionnier I, le trio héroïque de Bouchard). Il démontre un louable souci de la vraisemblance dans ses descriptions d’évolutions orbitales. En revanche, si on le compare à la séquence de dix-huit livraisons d’IXE-13 et aux 138 pages bien tassées de Vénus via Atlantide, il est nettement plus court que les autres.
En fait, il se situe à la lisière de la science-fiction. Il ne s’y rattache que par son ahistoricité – le Canada n’ayant pas de programme de vols spatiaux habités à cette époque – et par sa technologie de pointe : fusée à trois étages comme il ne s’en faisait pas encore d’une telle puissance et « avion-fusée » pour le retour sur Terre semblable à la navette mise au point ultérieurement par la NASA. La ceinture volante munie de fusées employant le peroxyde d’hydrogène comme ergol est par contre parfaitement contemporaine. La technologie n’est pas toujours à la page, cependant : Renaud doit réparer une radio à lampe !
L’intrigue est tout ce qu’il y a de plus classique. Les ingrédients ne surprennent pas : équipe restreinte de jeunes astronautes (forcément des hommes), base secrète isolée, signaux parasites qui détournent la fusée (comme dans l’album Destination Lune d’Hergé), machinations de méchants communistes pour mettre la main sur la technologie occidentale, savant allemand dévoyé, évasion spectaculaire de la base ennemie (non sans feux d’artifice)… La seule femme dans le décor (les coulisses, plutôt) est une espionne allemande qui trahit sa patrie d’adoption. C’est pratiquement la moitié de la recette de plus d’un film de James Bond (dont le premier sortit la même année) !
Comme roman d’aventures, il manque sans doute à Astra 1 appelle la Terre un minimum de chair. Dans un cadre aussi court, il se passe tellement de choses que les personnages ne prennent jamais vie et demeurent de simples pantins affublés de quelques traits caractéristiques. Il convient toutefois de noter la qualité du style, qui évite aussi bien la langue parlée de Pierre Daignault que l’emphase ampoulée de Guy Bouchard. Sainte-Marie s’en tient à une langue utilitaire, ponctuée de quelques exclamations viriles et d’explications plus techniques, ce qui a fort bien vieilli, somme toute. Les illustrations, en revanche, sont d’une naïveté affligeante.
À plus d’un égard, ce roman annonce les séries Unipax et Volpek publiées par Lidec quelques années plus tard, signalant la transformation d’une littérature de genre en fascicules pour jeunes adultes en une littérature de genre sous forme de romans pour jeunes. [JLT]
- Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 155-157.