À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Un soir qu’il boit avec des amis dans une taverne, Challu déclare qu’il donnerait tout son « précieux » en échange d’une chaîne qui faciliterait son travail. Sur le chemin du retour, il trouve l’objet convoité. Pour son malheur... Challu perd tout ce qu’il possédait : femme, enfants, maison. En voulant jeter la chaîne à la rivière pour s’en débarrasser, il s’y noie.
Commentaires
C’est toujours un plaisir de renouer avec l’œuvre d’Yves Thériault. Dans « Challu-la-chaîne », il reprend la tradition du conte oral qui a fait florès au XIXe siècle. Il utilise ici le thème de la malédiction qui frappe un homme à la suite d’une promesse proférée à la légère et que le diable prend au pied de la lettre. Mais là, j’extrapole un peu car le diable n’est jamais évoqué. L’originalité de Thériault est justement d’avoir fignolé une variation sur un pacte diabolique tout en prenant ses distances avec les figures canoniques du fantastique du siècle précédent.
Par contre, le rôle de l’alcool est beaucoup plus convenu, la boisson apparaissant un vice susceptible d’engendrer bien des malheurs.
Autre particularité de ce conte : le langage parlé est aussi manifeste dans le récit du narrateur que dans les paroles des protagonistes rapportées par celui-ci. Habituellement, le narrateur emprunte un style plus littéraire.
Si Yves Thériault nous a habitués à une écriture directe, voire crue, il sait aussi dire les choses à demi-mot. On admirera, par exemple, la fine allusion à la sexualité rude de Challu : « On supposait bien que, l’alcool aidant, les exigences de Challu devaient fatiguer le cœur de la Mathilde. »
« Challu-la-chaîne » permet de redécouvrir le côté tendre et mesuré d’Yves Thériault alors que l’histoire littéraire a surtout retenu le caractère violent, passionné et excessif de ses personnages. Les vrais durs ne dansent peut-être pas mais ils peuvent s’émouvoir. [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 175-176.