À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Un jeune garçon qui se promène en forêt aperçoit une petite maison au milieu d’une clairière. Il découvre dans la cave un cadavre qui se décompose sous ses yeux. Revenu sur les lieux après un moment de frayeur, il n’y trouve qu’un bâton. L’ayant saisi, il se rend compte qu’il s’agit d’une côte. On retrouvera le squelette de Gabriel quelques jours plus tard.
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Commentaires
En quoi les versions “retravaillées„ des contes que Daniel Sernine remet en circulation depuis 1984 sont-elles différentes des versions originales ? La comparaison systématique est un exercice fastidieux mais il fallait bien s’y résoudre une fois pour toutes. Dans « La Charogne », l’auteur a retranché environ 150 mots, ce qui est appréciable pour un texte de cette longueur. Il n’a conservé qu’un adjectif là où il y en avait deux ou trois, il a éliminé quelques détails peu pertinents à l’histoire (le fait, notamment, que Gabriel est un citadin) et quelques images bucoliques ou décoratives (une « grenouille à l’œil atone »).
Je ne sais pas si l’opération en vaut la peine. Certes, l’auteur a corrigé ainsi certaines maladresses qui l’amenaient à préciser ce qui tombait sous le sens et a supprimé certaines expressions désuètes (« Las ! ») mais le style, épuré, a perdu une partie de sa préciosité dont s’accommodait bien ce fantastique traditionnel. Par contre, la faiblesse majeure de cette nouvelle, à mon avis, n’a pas été corrigée. Il s’agit de ce passage où intervient sans raison une rupture de ton. Le narrateur interpelle tout à coup le jeune garçon (« Petit visiteur égaré, pourquoi es-tu allé chercher… ? »), puis reprend sa position d’observateur neutre.
Quant à l’histoire elle-même, dont le point de départ semble de toute évidence avoir été inspiré par un poème de Charles Baudelaire, elle ne varie pas d’une version à l’autre. Dans un premier temps, on se demande ce qu’a bien pu faire le jeune garçon pour mériter un sort aussi horrible. Le destin le frappe dans toute son absurdité. Une lecture au second degré nous révèle que « La Charogne » contient une formidable peur de la femme, une inavouable misogynie qui se nourrit de la croyance voulant que Dieu ait créé la femme avec une côte d’Adam. La nouvelle se termine en effet ainsi : « non plus qu’on ne comprit pourquoi il lui manquait une côte. » [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1988, Le Passeur, p. 153.