À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Huit mois après une mésaventure survenue en Islande, des jeunes de Calgary, de retour à la maison, se mettent à rêver des pâles habitants des grottes islandaises. Avec plus ou moins d’acuité, ils sentent que ce « peuple fantôme » les appellent à l’aide. Florian, Caroline, Ilana et Jason unissent leurs efforts pour comprendre cet appel onirique. Communiquant par Internet avec leurs amis éloignés qui étaient du voyage en Islande et leur professeur parti à Toronto, ils établissent la réalité du phénomène, puis éliminent leurs hypothèses initiales avant de se heurter à un mur.
En désespoir de cause, ils décident de faire appel à monsieur Saknussem, un médium qui se révèle singulièrement au fait de leurs problèmes. Cependant, Florian et ses amis surmontent leur méfiance initiale. Avec l’aide de Saknussem, Jason entrera en contact par le rêve avec les créatures en danger. Les indices sont déconcertants, mais Saknussem déchiffre l’énigme et conclut qu’il n’y a rien à faire. Les quatre jeunes s’insurgent et refusent l’inaction que Saknussem préconise. Avec son aide, ils feront de nouveau appel au don onirique de Jason pour entrer en contact avec le peuple des cavernes et convaincre ceux qui le peuvent de sauver ceux qui appelaient au secours…
Un peu secoués par leur aventure, Florian et ses amis se rassurent graduellement lorsque leurs rêves cessent de les tourmenter et ils obtiennent de leurs parents des vacances dans les Rocheuses.
Commentaires
Après avoir surmonté son aversion inspirée par une couverture d’une rare laideur, le lecteur découvre un roman plutôt gentillet, placé en partie sous le signe de Jules Verne. L’aventure, ici, vient chercher les jeunes personnages par l’intermédiaire de leurs rêves. Par conséquent, ils ne courent jamais le moindre risque, même si les rêves tournent aux cauchemars lorsque le « peuple fantôme » aux abois se fait plus pressant. Puisque le dramatique de la situation ne s’impose pas de lui-même, Florian et ses amis doivent surmonter leur scepticisme initial et consacrent une partie substantielle du livre à interpréter correctement l’appel au secours qu’ils reçoivent. La description de leurs démarches est relativement passionnante, mais elle n’est pas prenante. L’aventure ne se noue vraiment que dans le dix-neuvième des vingt-quatre courts chapitres que compte le livre.
Or donc, si l’intérêt du lecteur n’a pas complètement décliné avant ce point, c’est qu’il faut rendre hommage à la plume de Laurent Chabin. L’auteur parvient à soutenir et relancer plusieurs fois l’intérêt de la petite enquête que mènent Florian et ses amis. Cela a pour résultat de détourner l’attention du lecteur sur des pistes qui ne sont pas exploitées – leur ancien professeur, Réda, ne joue en fin de compte aucun rôle dans la résolution de l’aventure. Par contre, le trio principal formé de Florian, Jason et Caroline gagne en substance au gré des péripéties et s’attire les sympathies du lecteur. Forcés de concilier vie scolaire et enquête onirique, les jeunes protagonistes se montrent courageux et acharnés dans leur compassion.
Chabin fait de la communication par les rêves un phénomène empirique, lié à un talent que le peuple pâle aurait développé à force de vivre sous terre, dans le silence et l’isolement. Il n’emploie pas le mot télépathie et il ne fait pas non plus appel à des concepts nouvel-âgeux. Saknussem le médium révèle même qu’il a recouru à des trucs pour favoriser la première plongée dans le rêve de Jason. Ainsi, Chabin instaure un équilibre fragile entre une approche empirico-rationnelle du problème central et une résolution qu’il suffit de vouloir favorable pour qu’elle le soit…
Bref, il s’agit d’un roman sans vice majeur, de bonne tenue, mais qui a tendance à diluer l’intérêt de l’aventure principale en l’étirant au maximum. De manière fort intéressante, Chabin imagine que le péril encouru par des individus du « peuple fantôme » consiste en un mélange très humain d’imprudence des uns et de prudence exagérée des autres. Toutefois, la solution appliquée par Florian et ses amis est d’une simplicité un peu décevante. À la limite, on se demande pourquoi le « peuple fantôme » a dû faire appel à ces jeunes alors que les troglodytes pouvaient régler la situation entre eux. Mais pourquoi chipoter ? L’humanité et l’absence de prétention du roman sont plutôt rafraîchissantes. Et le public adolescent se voit parfois infliger bien pire. [JLT]
- Source : L'ASFFQ 1997, Alire, p. 55-56.
Références
- Doré, Jean, Lurelu, vol. 21, n˚ 1, p. 20.