À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
[18 FY ; 1 FA ; 6 HG]
Charles le sot
La Petite Gritte ou la nappe blanche
La Jarretière
La Belle et la Bête
Chance et la princesse aux cheveux d'or
Teigneux et le gros bœuf caille
Les Trois roses blanches
L'Enlèvement de Jeanne et d'Yvonne
Cendrillonne
Avenant et la princesse aux cheveux d'or
Le Petit Garçon qui avait eu peur
Le Bâtiment qui va par terre et par mer
Le Pêcheur et sa femme
La Princesse découronnée, mangeuse d'enfants
Le Conte du Diable
Gros Maudit pis Quatorze
Cornencul
Le Conte de P'tit-Jean
Jean le sot
Sarrau-de-Toile
Pou et Puce
Tinette et les roulettes
Le Bon Prince
Le Calendeur
Le Prince chéri
Commentaires
Contes du Détroit propose vingt-cinq contes traditionnels que Joseph-Médard Carrière a recueillis vraisemblablement, selon Marcel Bénéteau, en 1938 auprès de la petite colonie francophone du sud-ouest de l’Ontario, en face de Détroit. Dans son excellente présentation, Bénéteau retrace le parcours professionnel de l’universitaire Joseph-Médard Carrière dont la formation en philologie l’amené à s’intéresser à la persistance de la culture française en situation minoritaire, que ce soit en Ontario ou aux États-Unis, dans l’État du Missouri, de l’Illinois, du Michigan ou de l’Indiana. Il explique les recherches qu’il a menées pendant de nombreuses années pour situer la date de la collecte des contes par Carrière et connaître le nom des conteurs qu’il a rencontrés. Il fait aussi le point sur la nécessaire normalisation de l’orthographe des contes pour qu’ils soient lisibles, travail effectué en majeure partie par Donald Deschênes.
Qu’en est-il exactement de ce corpus encore vivant dans la première moitié du XXe siècle dans la région de Détroit du côté canadien ? Est-il si différent des contes recueillis par Marius Barbeau et Gustave Lanctot au Québec au cours de la même période et publiés dans sept numéros du Journal of American Folk-Lore ? Oui et non. Certains contes comme « Sarrau-de-Toile », « Le Pêcheur et sa femme », « Les Trois roses blanches » et « Le Bâtiment qui va par terre et par mer » se démarquent par leur originalité même s’ils reprennent certains épisodes connus. Il n’en demeure pas moins qu’ils font partie de ce fonds français ou européen auquel se rattachent les contes traditionnels québécois ou acadiens – pensons aux recueils d’Anselme Chiasson. Les trois derniers contes se distinguent toutefois de l’ensemble par leur structure narrative plus complexe (récits enchâssés). Ils s’inspirent de la tradition des contes des Mille et une nuits.
On remarque aussi une différence dans la langue parlée, certaines expressions ou constructions syntaxiques étant peu usitées au Québec. Malgré le travail de normalisation, certaines formulations ne sont pas faciles à comprendre. Exemple : « Maman, aujourd’hui, je vas aller à gagner pour vous aider à nous supporter. » Une lecture à voix haute serait probablement plus facile à saisir par l’auditeur qu’elle ne l’est par le lecteur laissé à lui-même. Le glossaire des archaïsmes et régionalismes fourni à la fin de l’ouvrage est bien utile mais certains mots ne s’y trouvent pas.
« La présence française au Détroit du lac Érié date de la fondation de la colonie par Antoine Laumet, sieur de Lamothe Cadillac en 1701 », écrit Marcel Bénéteau. Que la transmission de ces contes se soit perpétuée sur plus de deux siècles est en soi admirable, certes. Néanmoins, je ne peux m’empêcher de penser que des deux types de contes qui coexistent au Québec, le conte merveilleux inspiré de la culture française et le conte fantastique popularisé par Louis Fréchette, Pamphile LeMay et Joseph-Charles Taché notamment, ce deuxième courant me semble beaucoup plus authentique et inspirant car il s’enracine et s’incarne dans le territoire national.
Malgré l’intérêt qu’un lecteur ordinaire peut trouver à la lecture de Contes du Détroit, le recueil s’adresse d’abord aux folkloristes et spécialistes du patrimoine immatériel. À preuve, l’ouvrage est complété par une analyse des contes de la collection par Jean-Pierre Pichette et un index des titres selon la classification d’Aarne et Thompson qui fait autorité en la matière. La typologie des contes se répartit ici en cinq catégories : animaliers, merveilleux, romanesques, facétieux et de l’ogre stupide. Deux récits à formule composent aussi la collection. [CJ]
Références
- Labelle, Ronald, Rabaska 5, p. 149-150.