À propos de cette édition

Éditeur
Paulines
Titre et numéro de la collection
Jeunesse-pop - 58
Genre
Science-fiction
Longueur
Novella
Format
Livre
Pagination
120
Lieu
Montréal
Année de parution
1987
ISBN
2890391264
Support
Papier
Illustration

Résumé/Sommaire

Alors qu’ils sont à la recherche d’un transporteur de minerai qui a disparu à la surface de la Lune, Valérie et Yarik sont faits prisonniers par un Orissien qui exige en échange que lui soient rendus ses deux compagnons. Ceux-ci se sont posés sur la Terre le 23 juin 1995, la veille même de la Grande Catastrophe qui devait faire disparaître une grande partie de la civilisation terrienne. Puisque les Australians savent voyager dans le temps, Siparos, l’habitant d’Oris dont le vaisseau est en panne sur la Lune, leur demande de rescaper du passé ses compagnons. Faute de quoi, tous les passagers du vaisseau mourront car Siparos ne peut réparer l’ordinateur qui règle le système d’hibernation prolongée, lequel fonctionne grâce à un relais énergétique sur le point de s’épuiser.

Devant cette situation, Yana, la sœur de Valérie et de Yarik, accepte de retourner sur Terre en 1995 même si le Code de l’exploration temporelle d’Australia défend d’envoyer quelqu’un dans la Zone interdite. Elle réussit à convaincre Marc Greg et Samuel Morris, deux Terriens qui ont échappé à la catastrophe de 1995 en étant projetés dans le futur, de l’accompagner. Toutefois, Samuel fausse compagnie à ses deux complices au cours de l’expédition pour tenter de sauver sa femme et ses enfants d’une mort imminente. Yana et Marc doivent absolument le ramener avec eux car leur futur serait irrémédiablement chambardé pour le pire si Samuel devait disparaître. Leur vie en dépend. Après une course contre la montre, le trio est à nouveau réuni et peut retourner dans le futur. Samuel mourra cependant quelques instants après que la Grande Catastrophe soit entrée dans l’Histoire et dans le passé, ce qui n’affecte plus l’existence de Marc et Yana.

Commentaires

Contre le temps constitue la suite de De l’autre côté de l’avenir mais il n’est pas nécessaire d’avoir lu le premier roman pour comprendre les péripéties et les situations du second. Disons-le tout de suite : si la longueur de mon commentaire doit être proportionnelle à la valeur du roman de Johanne Massé et à l’intérêt qu’il a suscité chez moi, il sera bref. Ce n’est pas vraiment le côté « arrangé avec le gars des vues » qui m’a agacé dans ce récit. On commence à y être un peu habitué quand on lit des romans pour jeunes bâtis d’abord et avant tout en fonction de l’action. Le plus décevant, c’est de constater un manque affligeant d’originalité dans l’intrigue, le caractère prévisible des rebondissements et la monotonie d’une écriture sans surprise et sans relief.

À bien des égards, il n’atteint pas la qualité du roman de Francine Pelletier, Le Rendez-vous du désert, paru à peu près en même temps chez le même éditeur. Non pas que Contre le temps soit un mauvais roman, loin de là, mais c’est bien pire dans un sens : il est désespérément drabe et anonyme. Il faut dire que l’auteure l’a un peu cherché : utiliser le thème du paradoxe temporel et du voyage dans le temps, un des thèmes les plus éculés de la SF. Malgré tout, le thème du paradoxe temporel n’est pas si facile à manier et exige une rigueur et une logique qui préviendront les pièges qu’il comporte, les retourneront même en sa faveur. Johanne Massé ne se laisse pas prendre en défaut à ce petit jeu intellectuel et introduit même une notion nouvelle, celle du double temporel, qui prend vite le relais de l’histoire du sauvetage des deux Orissiens sur Terre car celle-ci est expédiée rapidement.

La fuite de Samuel Morris relance l’action dans une autre direction. En effet, le retour de Marc et de Samuel sur la Terre en 1995 posait un problème à l’auteure puisque cela supposait qu’ils pouvaient être à deux endroits en même temps. Elle s’en sert au contraire pour créer une intensité dramatique en inventant cette théorie du double temporel. Samuel et Marc, mais plus encore Samuel qui n’a jamais réussi à se défaire d’un sentiment de culpabilité à l’égard de sa famille qu’il se reproche d’avoir abandonnée au moment de la Grande Catastrophe, sont attirés vers leur double respectif. La tension qui en résulte risque donc d’anéantir l’original et son double. « Selon nos chrono-physiciens, il se produit dans la trame temporelle un genre de tension entre un individu et son double venu du futur. Leur présence simultanée en une même région de l’espace-temps est un paradoxe. Ce paradoxe tend à se résoudre de lui-même, par l’annihilation d’un des individus, probablement celui qui est en surnombre – celui qui est de trop, en quelque sorte. Ou peut-être même par l’anéantissement des deux. »

Yana se doit donc d’empêcher cette réunion fatale mais légitime. Cette idée de double temporel constitue certes l’élément le plus original du roman et l’élève au-dessus de la médiocrité où il allait sombrer allégrement à mi-chemin. Elle revitalise le récit mais Johanne Massé l’utilise trop peu pour enrichir la psychologie de ses personnages. Celle-ci demeure sommaire. Ainsi, il ne nous est donné qu’une seule fois de pénétrer dans les sentiments de Yana quand elle évoque avec émotion un voyage temporel antérieur qui l’a amenée à Varsovie en 1939, dans le ghetto juif. Ces moments d’émotion sont rares dans Contre le temps. De même, le drame de Samuel, quoique foncièrement pathétique et humain, ne nous touche pas vraiment car l’auteure ne présente pas le personnage sous un angle sympathique.

Encore une fois, le thème du voyage dans le temps nous oblige à frapper de plein fouet ce paradoxe qui résiste à la raison, véritable noyau indivisible : on ne peut changer le passé mais on peut empêcher qu’il soit changé. Je me demande comment un jeune lecteur reçoit un tel sophisme. Personnellement, je ressens toujours un certain vertige devant un raisonnement semblable. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 116-117.

Références

  • Le Brun, Claire, imagine… 43, p. 121-122.
  • Pelletier, Francine, Solaris 73, p. 52.
  • Pirro, Michel, Nos Livres, novembre 1987, p. 28.