À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
- Un garçon ordinaire de dix ans subit les frustrations et les humiliations propres à son âge. Mais il finit par en avoir marre de toujours réagir avec la même gentillesse. Pour se défouler, il agresse une corneille en lui lançant un gros boulon, geste cruel qu’il regrette aussitôt. En soignant l’oiseau, il découvre qu’il peut communiquer avec lui. Il apprend ainsi que les corneilles sont méchantes, qu’elles adorent s’insulter entre elles, qu’elles aiment la saleté, bref, qu’elles sont tout le contraire d’un enfant humain bien élevé. L’oiseau lui suggère d’aller rencontrer les sorcières qui se réuniront bientôt près de chez lui et de solliciter le privilège d’être métamorphosé en corneille. La tentation est trop forte pour le garçon. Il se rend au cimetière et obtient des sorcières qu’elles exaucent son désir. Dès lors, il vivra les bonheurs et les malheurs de la vie d’une corneille. Il se vengera des gens qui l’humiliaient, s’amusant à être désagréable en tout. Lorsqu’il décide de redevenir un petit garçon, un grave problème se pose : les sorcières ont quitté la ville !
Commentaires
Un bon livre pour jeunes est un bon livre, point. C’est ce que je pense. Oh ! bien sûr, on ne verra pas souvent un adulte, dans l’autobus ou dans le métro, lire un roman jeunesse avec ostentation. Je n’irais pas non plus jusqu’à suggérer aux adultes de remplacer leur livre de chevet par un livre pour enfants ou pour adolescents. Je n’agirais pas ainsi moi-même et la question n’est évidemment pas là. Il n’empêche que certains ouvrages destinés aux jeunes sont progressivement devenus des classiques de la littérature universelle. D’autres sont aujourd’hui réédités indifféremment dans des collections pour le grand public et dans des collections pour la jeunesse.
Corneilles de François Gravel n’entrera peut-être jamais dans le club restreint des chefs-d'œuvre immortels. Mais il appartient certainement à la catégorie des livres jeunesse qui sont susceptibles de plaire à tous. Pourquoi ? Parce qu’il est bien écrit, d’abord. Et bien écrit, ça signifie avant tout : écrit – je veux dire par là que son écriture a été pensée. Résultat : on lit ce livre avec un vrai plaisir de lire, voilà.
Elle est pourtant simple, cette écriture. Tout à fait adaptée au public visé que je situerais aux alentours de huit ans. Le narrateur est le héros, un enfant de dix ans donc. Sage et sensible, oui, mais cruel à ses heures aussi, dans ses pensées comme dans ses actes. François Gravel n’essaie de faire croire à personne que les enfants sont ou devraient être des parangons de douceur et d’innocence. Son héros est tout à fait crédible, de même que le seront les mésaventures de ce dernier lorsqu’il deviendra corneille. L’auteur – cela se sent – a effectué quelques recherches, des observations du moins, pour en arriver à rendre plausible le comportement de l’enfant-oiseau.
Cela donne un roman sympathique, intelligent et drôle, axé sur la découverte de la tolérance, un roman qui réactualise des procédés fréquemment utilisés dans la littérature pour enfants : métamorphose, sorcellerie, apprentissage d’un nouveau point de vue, épreuves. Comme dans bien des récits pour l’enfance, on y trouve des animaux à profusion (beaucoup de corneilles, en tout cas) et de méchantes sorcières (pas si méchantes que ça, au fond). L’histoire est toujours intéressante, quoique l’on assiste à un essoufflement vers la fin et tout ce qui se passe alors devient un peu trop facile.
Certains traits d’humour sont savoureux. Ainsi, la formule magique permettant au héros de se métamorphoser est, en fait, la liste des additifs chimiques contenus dans une boîte de biscuits ! Lorsque le garçon demande à une corneille ce qu’est un colloque, cette dernière répond : « C’est une espèce de réunion que les sorcières s’inventent quand elles s’ennuient et qu’elles ont envie de visiter une autre ville. »
Ce premier roman jeunesse de François Gravel, publié dans une toute nouvelle collection, est une jolie réussite. Rappelons que cet écrivain nous avait déjà donné trois romans, dont La Note de passage qui avait agréablement surpris l’équipe rédactionnelle de L’Année de la SFFQ. [DC]
- Source : L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 99-100.
Références
- Guindon, Ginette, Lurelu, vol. 13, n˚ 1, p. 12.
- Lortie, Alain, Solaris 91, p. 47.
- Mailhot, Payse, Québec français 78, p. 100.