À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Le narrateur s’adresse mentalement à son père décédé à différents moments de sa vie d’adulte. Il lui parle de la forêt de frênes que Pap avait plantée quand lui, son fils, était enfant. Il évoque le souvenir de leur différend à l’adolescence, son travail comme concepteur holographique à Las Vegas, son échec familial et son retour à Victorinville.
Commentaires
Jean-Pierre April a remporté avec ce texte le prix littéraire 1989 de la ville de Drummondville. Mais plus important encore, « Dans la forêt de mes enfances » marque un changement majeur dans la production de l’auteur. Le “dialogue à sens unique” qu’entretient son personnage principal – le narrateur – avec son père constitue une véritable déclaration d’amour, ce qui est rare chez April.
On découvre dans ce texte une tendresse nouvelle, une sérénité qui vient après l’âge de la révolte, après les dénonciations virulentes des injustices sociales, des leurres technologiques et des excès de la société de consommation. Une intimité nouvelle s’affiche à la faveur de l’utilisation du “je” auquel April a recours. On a l’impression pour la première fois qu’il met ses tripes sur la table, qu’il est capable de puiser dans ses émotions et de se mettre à nu.
Ce renouveau se prolonge aussi dans le choix de la thématique centrale qu’il aborde : les relations père/fils. Ce rapport est d’abord marqué par le fossé des générations et par l’opposition Renature (père)/Néo-Nature (fils). Le premier croit au reboisement, à la redécouverte de la nature primitive tandis que le second mise sur l’artifice de la nature restaurée dont l’exemple le plus probant est cette holoforêt à laquelle il consacre son temps et son talent de concepteur. Pourtant, il finira par se rendre compte que son père et lui travaillaient pour une même cause, par reconnaître que Pap avait raison et par se réconcilier avec lui.
April livre quelques réflexions émouvantes sur la paternité, sur l’enfance et sur la condition masculine, tous des thèmes nouveaux dans son œuvre. « En donnant la vie, on prend conscience de la durée limitée de la sienne. Devenir pap, c’est renaître, mais c’est aussi se préparer à mourir… » « On ne devient pas vraiment Pap, c’est un titre qu’on nous donne pour nous garder à la maison, tandis que la femme devient mère avec tout son corps. »
Pour la première fois aussi, l’environnement immédiat dans lequel vit l’auteur apparaît dans son œuvre. Est-ce parce qu’il a écrit cette nouvelle dans le cadre d’un concours régional et qu’il voulait ainsi prouver son appartenance à sa région d’adoption, les Bois-Francs ? Je crois qu’il s’agit de quelque chose de beaucoup plus fondamental que cela.
Enfin, « Dans la forêt de mes enfances » s’appuie sur une écriture plus maîtrisée, mieux assortie au sujet et moins tape-à-l’œil et clinquante qu’auparavant. Paradoxalement, alors que sa nouvelle reconnaît implicitement la continuité comme valeur humaine essentielle, Jean-Pierre April opère dans son imaginaire une petite révolution. Pour cette raison, il s’agit d’un texte éminemment important. [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 18.
Prix et mentions
Prix de la Société Saint-Jean-Baptiste – Fondation Mgr Parenteau 1989