À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Un professeur de Musgrave Harbour raconte comment un brouillard épais et infranchissable s'est abattu sur la région à la fin du printemps, isolant le village et faisant périr ses habitants. Les équipes de secours ayant réussi à se rendre sur les lieux après deux mois d'insuccès découvrent des centaines de cadavres dévorés par le fog, dont celui du professeur.
Commentaires
Le récit de Michel Bélil n'est pas à proprement parler autobiographique mais l'auteur l'a nourri de ses angoisses et de ses fantasmes personnels. Sachant qu'il a vécu un an à Terre-Neuve, il est facile de deviner que cette histoire de fog qui isole et asphyxie les habitants d'un petit village côtier est une transposition à peine déguisée du sentiment d'isolement qui a dû l'accabler en tant que francophone immergé dans un milieu anglophone et totalement étranger. Et quoi de mieux indiqué que le fantastique pour exacerber ses états d'âme et donner une dimension tragique à la condition humaine et au quotidien le plus banal.
La description de l'environnement, fruit de notations sommaires mais précises faites sur le terrain par l'auteur, profite au récit qui acquiert un sens de l'authenticité indéniable. L'efficacité de « Celui qui se cache dans le fog » repose aussi sur le témoignage direct du narrateur dans la première partie et sur la discrétion de l'auteur qui se refuse à définir clairement les propriétés du brouillard. Bélil avait déjà compris à cette époque que le fantastique horrifique gagne souvent à faire l'économie des détails et à se réfugier dans l'indicible.
La seule faiblesse de ce texte réside, à mon avis, dans la deuxième partie constituée par le rapport du premier ministre au conseil des ministres. L'écriture ne se distingue pas suffisamment de celle du témoignage du professeur. L'auteur aurait eu avantage, je crois, à utiliser un style technocratique plutôt que ce ton de l'exposé oral qui détonne un peu avec le caractère officiel du document.
Tout considéré, le conte de Michel Bélil illustre on ne peut mieux le versant sombre de ses textes de jeunesse car il y a aussi un versant humoristique dans la production de ses débuts. [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 305-306.