À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Guidé par Charles Weiss via vidéophone, Max Vidal entreprend de court-circuiter les plans de l’organisation de Morgan qui se prépare à annoncer sur le réseau de télévision national le renversement du gouvernement canadien actuel et l’amorce du processus d’annexion du Canada aux États-Unis. En se substituant à une équipe de livraison de matériel-télé, Max et ses comparses s’insinuent dans le studio, en prennent vite le contrôle et se préparent à diffuser un message de Weiss. Déterminés à l’interrompre, les troupes de Rilke font irruption live dans le studio ; cet assaut retransmis en direct à l’échelle nationale ternit à tout jamais l’image de l’organisation.
Commentaires
Je reprends donc la novella de Frigerio là où je l’avais laissée l’an dernier. Les deux derniers chapitres confirment ce que j’avais dit de l’auteur précédemment, c’est-à-dire qu’il a le sens de l’intrigue et du suspense. Pourtant, dès le troisième volet, j’ai commencé à éprouver une sensation de déception et parfois même d’ennui au cours de ma lecture. Il m’a semblé que l’intrigue se mettait à ralentir, que l’imagination de l’auteur s’étranglait un peu, qu’il tombait dans le déjà vu. Je suis alors retourné aux précédents chapitres, les ai relus pour vérifier si cette baisse de tension n’était pas l’effet de ma propre subjectivité ; ça n’a servi qu’à raffermir mon impression de laisser-aller. À partir du troisième chapitre, une métamorphose graduelle s’opère ; le texte quitte le domaine de l’anticipation socio-politique crédible (à défaut d’être inédite) pour prendre des allures de thriller-tourné-pour-la-télévision, si vous voyez ce que je veux dire (on pense à Mission : impossible). Les répliques de dialogues, déjà longues dans les premiers chapitres, se font tortueuses sinon grotesques. Est-ce délibéré de la part de l’auteur ? On n’en sait rien mais on en doute, ne voyant pas la pertinence de ce changement de ton.
Parmi les autres passages qui m’ont fait grincer des dents, il y a cette histoire de boule de cristal/vidéophone avec l’aide de laquelle Max, emprisonné chez Morgan, communique avec Charles, détenu ailleurs en ville. Ici, je crois que Frigerio abuse carrément de la crédulité de ses lecteurs en leur demandant de croire qu’une femme aussi rusée qu’Emmie Morgan laisserait à la disposition d’un prisonnier un tel appareil. Quant à l’évasion que Max et Charles planifient ensemble, elle est digne de MacGyver bien qu’encore une fois ni très convaincante ni très originale.
Le dénouement de l’histoire n’est pas venu dissiper cette impression d’inachèvement qui m’étreignait depuis la moitié du troisième chapitre. Malgré tout, j’avoue que je garde une opinion plutôt favorable de l’ensemble du récit et lirai sans hésitation les prochaines œuvres de Frigerio (d’ailleurs, à ce sujet, à quand le premier bouquin ?). Je me résumerai donc : voilà un texte qui tentait de marier les conventions feuilletonnesques à la rigueur de l’anticipation politique. Quel dommage qu’aux dernières heures l’équilibre requis pour une telle union ait échappé à l’auteur. [SP]
- Source : L'ASFFQ 1990, Le Passeur, p. 79-80.