À propos de cette édition

Éditeur
XYZ
Titre et numéro de la collection
L'Ère nouvelle
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
L'Esprit ailleurs
Pagination
57-72
Lieu
Montréal
Année de parution
1992

Résumé/Sommaire

Quatre vieillards bicentenaires, trois hommes et une femme, se réunissent quotidiennement pour prendre le thé et évoquer des souvenirs de jeunesse. Chacun de ces théons dont la taille ne dépasse pas quarante centimètres a connu jadis son heure de gloire comme écrivain. Cependant, ils ne partagent pas tous les mêmes idées et il arrive que les discussions soient animées et suscitent des frictions, surtout quand il s’agit de convictions politiques.

Commentaires

André Brochu possède une habileté indéniable à camper des personnages et à se moquer de lui-même. Cet art atteint son sommet dans « Le Divin Âge ». Les portraits de Luc, de Fabrice, d’Edgar et de Marceline, la muse du groupe, sont très bien ciselés. On suit avec délice leur conversation de salon qui nous en dit long sur la personnalité de chacun. À travers leurs propos nostalgiques et empreints de civilité, on ne manque pas de relever des allusions mesquines ou sarcastiques qui trahissent le fond de la nature humaine. On a beau être vieux et décatis, on a encore son orgueil.

Le texte est traversé d’un humour très spirituel qui montre que l’auteur est capable de manier l’autodérision. Car il ne faut pas s’y tromper : Brochu s’est sans doute inspiré de quelques confrères en plus de s’être mis lui-même en scène sous les traits de Fabrice (probablement). Il s’identifie à ces professeurs qui ont fait carrière dans l’institution universitaire au cours du dernier quart du XXe siècle et qui ont écrit en marge de leur profession principale quelques œuvres qu’ils croient volontiers importantes. Ils s’illusionnent, bien sûr, mais il faut bien trouver une raison de vivre quand on a plus de deux cents ans.

Nouvelle à clé, donc, qui en plus d’effleurer la question nationale qui n’est toujours pas réglée au XXIIe siècle, s’en prend de façon délicieusement irrévérencieuse aux théories littéraires qui ont conduit tout droit la littérature à sa disparition. Ainsi en est-il de l’irréalisme, cette école de pensée inventée par Edgar : « Le grand atout de l’irréalisme, lequel avait rivé leur clou à toutes les écoles modernes dénégatrices de l’écriture au sein même du projet textuel, c’était d’effectuer un retour à la représentation innocente, tout en supprimant les contraintes du vraisemblable. » On se croirait en pleine pataphysique !

Bref, une nouvelle à l’humour décapant contenant quelques flashes désopilants comme ces hyperclones d’Emma Bovary ou de Balzac et des remarques bien senties sur le droit d’auteur. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 38.