À propos de cette édition

Éditeur
PUBLIQ
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Solaris 134
Pagination
47-62
Lieu
Beauport
Année de parution
2000
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Un spécialiste des bibliographies travaille à la rédaction d’un ouvrage qui répertorie tous les textes de la littérature qui mettent en scène un vampire. Un soir, un certain Arnim von Arnheim, qui se dit l’envoyé du comte Dracula, le somme de transcrire au plus vite le contenu des fiches bibliographiques classées dans des boîtes de chaussures et de publier son livre car ses collègues n’apprécient pas être aussi mal logés. Dégoûté par les exactions du vampire, incapable de trouver un éditeur, le bibliographe fait imprimer son livre en un seul exemplaire pour le brûler aussitôt.

Commentaires

L’auteur annonce ses couleurs dès le titre qui est un clin d’œil au roman d’Anne Rice, Entretien avec un vampire. On connaît l’humour de Norbert Spehner : il ne s’en prive pas dans cette histoire où il donne un aperçu de ses connaissances encyclopédiques en matière de littérature fantastique et affiche sa passion pour les travaux bibliographiques. Tout cela est éminemment sympathique même si le sujet n’est, en soi, pas très original. On devine la chute bien avant la fin, en partie à cause du prologue qui va peut-être un peu trop loin avant de nous ramener au début de l’histoire.

En fait, le problème que j’éprouve avec ce texte repose moins sur un manque de crédibilité du récit que sur un désaccord fondamental avec l’idée qu’il promeut. Puisqu’on est dans l’irrationnel à plein (une créature de fiction surgit dans la réalité du bibliographe, le harcèle et le menace), on peut croire à la destruction des personnages de fiction en brûlant les textes dans lesquels ils s’incarnent. Mais, pour moi, ce sont les textes de fiction qui confèrent véritablement une vie aux personnages, qu’ils soient vampires ou professeurs, bien plus que les ouvrages bibliographiques. Ce n’est pas en détruisant un livre qui contient toutes les références aux personnages de vampires qu’on va éliminer les vampires. Si on peut concevoir que ce raisonnement est valide pour les textes à très petit tirage, il est difficile d’imaginer en quoi les vampires célèbres comme Dracula, Lestat et autres qui existent virtuellement dans des millions de livres peuvent être inquiétés par la destruction d’un tel ouvrage.

Consciemment ou non, Norbert Spehner prône en définitive, en vertu de la prémisse sur laquelle repose « Entretien avec une boîte de chaussures », la suprématie des ouvrages bibliographiques sur les œuvres de fiction. Je ne voudrais pas avoir l’air de celui qui crache dans sa soupe : après tout, je me consacre à des travaux semblables. Mais il ne me viendrait pas à l’idée de les croire plus importants que les œuvres elles-mêmes.

C’est dire que la nouvelle de Spehner est plus importante que ce que je peux en penser, en toute modestie ! Comme objet littéraire, en tout cas, elle se défend malgré tout plutôt bien. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 2000, Alire, p. 161-162.