À propos de cette édition

Éditeur
Le Progrès du Saguenay
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Le Progrès du Saguenay, vol. XXXIX, n˚ 9
Pagination
3 ; 2
Lieu
Chicoutimi
Date de parution
23 octobre 1924

Résumé/Sommaire

Un cultivateur, Jérôme Pattu, ayant invoqué étourdiment le diable, voit arriver un jeune homme, Gaspard Lafortune, qui propose ses services pour le temps des foins. Céleste, la fille de la maison, n’est pas insensible à ses charmes même si elle songe à entrer au couvent. Après quelques jours, l’homme engagé se montre moins ponctuel et la famille commence à avoir des soupçons sur sa conduite. Rémy, le neveu du cultivateur, aperçoit une nuit une lueur près de la grange. Il trouve le corps de Gaspard étendu par terre.

Commentaires

À la lecture de cette nouvelle, j’avais le sentiment d’avoir déjà lu ce texte. J’ai finalement découvert le pot aux roses. « Le Feu-follet » d’Azelia est une nouvelle version d’« Une légende » signée Azilia et parue en 1892. Le cœur du récit, soit ce qui arrive à l’homme engagé, est le même mais l’auteure a modifié le nom des personnages et quelques détails et, surtout, l’histoire est devenue celle d’un feu-follet alors qu’à l’origine, elle était celle d’un loup-garou. C’est pourquoi j’ai eu tant de mal à faire le lien entre les deux textes.

Le début de la nouvelle, sous-titrée « Conte d’antan », installe le rituel habituel qui encadre la narration d’une anecdote ancienne, aux temps où la campagne était peuplée de loups-garous, de feux follets et de sorciers. Par une soirée pluvieuse et froide de l’automne, l’homme du foyer bourre sa pipe au coin du feu. Mais, surprise ! C’est la grand-mère qui prend la parole et raconte une histoire à ses petits-enfants.

« Le Feu-follet » est l’un des récits qui expliquent le mieux la nature du feu follet et représente, à mes yeux, la synthèse des histoires sur ce sujet. Les paroissiens qui ne faisaient pas leurs Pâques étaient susceptibles de tomber, sur le coup de minuit, deux ou trois fois par semaine, « dans une insensibilité qui ressemblait à la mort. Alors, leur âme quittait leur corps pour courir dans les nuits sans lune […] puis au matin, elle reprenait sa place et l’homme un peu brisé reprenait sa tâche ». C’est exactement ce qui arrive à Gaspard Lafortune et l’auteure décrit de façon exemplaire les étapes qui le mènent à la mort. Au passage, Azelia déplore subtilement l’exode des Canadiens français vers les usines de la Nouvelle-Angleterre quand Gaspard, désireux d’épouser Céleste, lui demande de convaincre son père de vendre la terre et de leur donner de l’argent pour qu’ils puissent aller vivre aux États-Unis. 

La qualité d’écriture de la nouvelle est bien supérieure à la moyenne des textes parus au cours de la première moitié du XXe siècle. En outre, l’auteure distille des informations ethnologiques qui recréent le quotidien d’une famille à la tombée du jour : la grand-mère tricote, la mère est au rouet et la jeune fille aux travaux de couture. 

En somme, cette nouvelle mouture est tout aussi intéressante que la version originale. [CJ]