À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Après avoir fui la ville emmurée du précédent épisode, Wondeur, perdue dans des canaux sombres, se retrouve face à un château fait de bouteilles et gardé par un gigantesque crabe. Ce dernier a bien vu passer son père mais il ne veut pas parler à moins qu’elle ne le protège pendant sa mue. Mais Wondeur ne lui fait pas confiance. Elle rencontre alors Moussa, un jeune garçon perdu et avec lui elle poursuit sa route.
Ils aboutissent à une ville ensevelie sous les ordures où tous les gens portent des œillères. Une vieille femme qui soigne les arbres mettra Wondeur sur la piste du karatéka, un homme étrange qui habite dans un phare désaffecté. Mais ce n’est pas son père. Déçu, Wondeur ne sait plus quoi faire, mais Moussa a trouvé sa voie : il va aider la vieille femme à sauver les arbres de la ville. Wondeur décide de l’assister dans sa tâche.
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Commentaires
La série de Joceline Sanschagrin se démarque de belle façon de la littérature jeunesse habituelle. Par le ton, d’abord, qui n’a rien de gai, frôlant même le tragique, et l’imaginaire, qui rappelle à la fois la science-fiction, le fantastique, le merveilleux, l’onirisme et je ne sais quoi encore. L’hybridation prend tout son sens ici. Et le résultat surprend.
S’adresser à une tranche d’âge bien précise n’est pas de tout repos, cela va sans dire. Joceline Sanschagrin semble fort bien s’accommoder de ce genre de contrainte. Si les phrases sont courtes, simples et sans difficultés majeures, l’ensemble s’enchaîne tellement bien qu’on n’a pas vraiment l’impression d’une écriture retenue. Rompant avec la détestable manie d’une majorité d’écrivains pour jeunes actuels, l’auteure ne surcharge pas son texte de phrases toutes faites et de patois abracadabrants. À peine si, de temps à autre, Wondeur se permet un « Sorte d’affaire ! » assez personnel pour se démarquer mais qui ne fait pas basculer le texte dans les travers des téléromans québécois.
La Fille aux cheveux rouges s’avère la suite directe de Atterrissage forcé. Ce premier épisode nous avait laissé sur une série de points d’interrogation ; ce deuxième ne lui cède en rien sur ce sujet. De là à dire que la série se poursuivra, cela semble évident. Du père de Wondeur, toujours aucune trace ; des situations géographiques de l’itinéraire étrange de la jeune héroïne, nous ne savons toujours rien. Bien que Joceline Sanschagrin place dans la bouche de certains personnages des références à notre réalité, il va sans dire que la ville du Mur, dans le premier épisode, et le Quai de brumes et la ville aux ordures, dans le deuxième, n’ont pas leur place sur notre Terre. Mais où se passe donc cette histoire ?
Le haut niveau de symbolisme qui englobe l’imaginaire de Joceline Sanschagrin et, surtout, sa façon de le créer, nous font pencher vers la réalité parallèle – SF si l’auteure explique le dérapage, fantasy sinon – ou encore l’onirisme. Du symbolisme, je me contenterai de montrer ces citadins qui portent des œillères dans ce dépotoir mondial qu’est devenue leur ville. De la structuration de l’imaginaire, je retiendrai les extrêmes mis face-à-face : la force apparente du crabe qui craint cependant pendant sa mue, la fragilité de la vieille femme qui recèle une volonté inébranlable, les fanfaronnades du karatéka qui recouvrent sa peur maladive…
Un deuxième épisode d’une belle richesse pour cette série qui s’annonce comme l’une des meilleures chez La courte échelle et dans toute la littérature jeunesse québécoise. [JPw]
- Source : L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 188-189.
Références
- Dubé, Pierrette, Lurelu, vol. 12, n˚ 3, p. 12.
- Le Brun, Claire, imagine… 48, p 107-108.
- Lortie, Alain, Solaris 85, p. 52.