Grotte aux mirages (La)

La petite famille de Linda Lemoyne – Patrick, son mari photographe, et ses enfants Audrey et Stéphane – est en vacances à Paris. Sur un coup de tête, le quatuor part au hasard et, rapidement, le voilà, pour le plaisir, sur les traces de Frambaldus de Laceo, mieux connu sous le nom de Lancelot du Lac. Or, ce que la famille Lemoyne ne sait pas, c’est que deux militaires la suivent à la trace. L’homme et la femme sont sous les ordres d’un général. Depuis l’explosion du laboratoire secret de l’énigmatique Érasme Bular, le patron de Linda, l’armée veut, tout autant que Bular, s’approprier des connaissances du passé susceptibles de mener à l’invention d’armes spéciales.

À la suite d’une série de hasards – mais est-ce bien le hasard qui la guide ? –, la famille Lemoyne aboutit à une grotte, la « porte de l’Ankou », au cœur de la forêt de Brocéliande. Les Lemoyne y vivront une expérience surprenante sous l’emprise des effluves d’un champignon hallucinogène, puis découvriront des artefacts extraordinaires : des sculptures de guerriers, une tête de dragon et deux tablettes gravées, la première par Lancelot du Lac, la seconde par nul autre que Don Felipe Da Gozal, ce mystérieux personnage du XVI^e siècle dont Linda suit, bien malgré elle, la piste ancienne depuis si longtemps.

L’auteur de la série « L’Énigme du conquistador », qui nous avait habitués à deux aventures de la famille Lemoyne par année, ne propose en 1999 qu’un seul opus, de surcroît un peu plus court que les précédents. Mais cette relative brièveté ne change en rien la manière de la série et on a droit, comme à l’habitude, à un habile mélange d’action, de rebondissements, de connaissances ésotériques et d’événements extraordinaires. Après l’Égypte et les légendes amérindiennes, Marillac nous amène en Bretagne dans la forêt de Brocéliande et c’est l’occasion de mettre de l’avant la mythologie celte avec, à l’avant-plan, le personnage hautement inspirant de Lancelot du Lac.

Outre les aventures extraordinaires que vit la famille Lemoyne, l’intérêt premier de la série demeure la « surhistoire » qui relie l’ensemble des volumes et qui consiste à retrouver les traces du parcours de Don Felipe Da Gozal au XVI^e siècle, ce fameux conquistador qui a découvert plusieurs objets de pouvoir des temps anciens. Mais il serait plus juste de dire que c’est une force inconnue qui guide les Lemoyne sur la piste du vieux conquistador – c’est très clair dans ce volume-ci puisque c’est « totalement par hasard » que Linda et sa famille aboutissent en Bretagne.

Par ailleurs, le mystérieux Érasme Bular, le patron de Linda dont le laboratoire secret a explosé dans la précédente aventure, dévoile son jeu dans cet épisode-ci, d’autant plus qu’il est maintenant aux prises avec l’armée qui, elle aussi, voit d’un très bon œil la possibilité d’acquérir à peu de frais des armes inédites. Une bonne partie des rebondissements de La Grotte aux mirages est d’ailleurs le fruit de cette association obligée : Bular, tout comme l’armée, faisant espionner et suivre les Lemoyne, il y aura des flammèches entre les poursuivants, voire la mort d’un des poursuivants, une mort qui, il faut le souligner, ne générera pas la moindre émotion chez les protagonistes, comme quoi les personnages secondaires, dans cette série, sont vraiment « secondaires » !

Au bout du compte, toute cette action, on s’en doute, est sans conséquence sur le résultat de la recherche des Lemoyne, ce qui est assez frustrant pour le lecteur qui, devant ce « dirigisme » constant de la famille, se demande où peut maintenant loger le suspense – autrement dit, les ficelles, qui n’étaient déjà pas petites dans les précédents épisodes, prennent une ampleur dérangeante dans ce volume-ci, tant et si bien que la vraisemblance de cette quête, qui faisait l’intérêt premier de cette série, est grandement malmenée.

Mais le véritable coup de théâtre de La Grotte aux mirages, c’est à la toute fin que le lecteur le découvre, alors que Marillac annonce que L’Antre des veilleurs, prochain volume de la série, sera aussi le dernier ! Souhaitons que la résolution de « L’Énigme du conquistador » soit à la hauteur et qu’Alain Marillac, pour cet ultime rendez-vous, nous ait réservé non seulement de l’action et des événements extraordinaires, mais aussi une finale vraisemblable. [JPw]

• Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 105-107.

• Spehner, Laurine, Lurelu, vol. 23, n˚ 1, p. 31-32.