Hallucination 2 pistons

Un groupe de jeunes réactionnaires et amateurs de motos est étonné un mardi soir comme un autre quand surgit devant eux un homme barbu chevauchant un chopper 750 cc. Le nouveau venu entraîne le groupe de motards en devenir dans une virée où il partage sa philosophie sur la vie et la moto, de même qu’un liquide étrange issu d’une gourde et qui plonge les motocyclistes dans un état d’extase. Leur virée les mène au nirvana de la vitesse et des vrombissements… à moins bien sûr qu’il ne s’agisse que d’une hallucination collective de simples jeunes en train de se saouler.

On retrouve dans ce premier texte d’April dans Requiem, écrit à quatre mains, une bonne partie de ce que l’auteur allait exploiter plus tard en solo dans diverses nouvelles. Un bon degré d’imagination accompagné d’une narration compétente et moderne, entachée d’un joual sous-jacent, d’envolées poétiques, avec une nette prédominance du questionnement de la réalité et de la présence d’hallucinations assumées.

Par contre, on retrouve aussi les lubies tout aussi typiques de l’œuvre à venir d’April : obsession pour les hallucinations, présence d’éléments de narration incongrus – comme ce personnage qui se nomme Alex Térieur, ou cette métaphore du soleil dans lequel on pénètre « comme dans un marshmallow mou et doux » – ainsi qu’une finale vaguement poétique mais néanmoins décevante.

C’est donc un mélange d’intérêt et d’exaspération qui accompagne le lecteur ici. On peut toutefois noter que, contrairement à plusieurs textes ultérieurs de l’auteur, cette nouvelle demeure entièrement compréhensible et ne devient pas, en cours de route, un mélange de SF et de n’importe quoi. Comme plusieurs textes de cette époque, son intérêt relève désormais, pour les amateurs d’April, de la (re)découverte des premiers textes d’un auteur afin d’y déceler ses premières inspirations. [HM]