À propos de cette édition

Éditeur
Librairie Déom
Longueur
Courte nouvelle
Paru dans
Conteurs canadiens-français (époque contemporaine)
Pagination
337-339
Lieu
Montréal
Année de parution
1970

Résumé/Sommaire

Sophie, insomniaque chronique, consulte le célèbre Swâmi Vrahnadana, qui lui fait comprendre qu’elle est trop lourde moralement, et que le sommeil ne peut pas l’emporter : elle doit se transformer en fumée. Le conseil fonctionne si bien qu’un pompier surgit à sa fenêtre, ce qui signe le début d’une histoire d’amour. Mais le pompier, près d’elle, n’arrive pas à dormir, et la transformation en fumée ne fait qu’éveiller ses instincts professionnels. Swâmi Vrahnadana insiste pour qu’il oublie ses tâches : s’il voit de la fumée, s’il entend l’alarme, il doit résister. Il s’y résigne, et les deux amoureux peuvent enfin dormir du sommeil du juste, dans une chambre aux murs roussis et aux fenêtres éclatées.

Première parution

Histoire d'amour 1964

Commentaires

Dans ce petit conte que Carrier a initialement fait paraître dans son recueil Jolis Deuils, le fantastique s’allie au réalisme magique pour donner vie à une histoire dont la fin a priori tragique parvient à soutirer au lecteur un sourire de béatitude. Les amoureux ne sont pas morts ignifiés : ils vivent dans un ailleurs où ils sont enfin parvenus à conquérir une légèreté qu’on devine longtemps con­voitée. La plume poétique de Carrier, qui rappelle par certaines exclamations la verve des Mille et une nuits, nous convie dans un monde où tout est possible. Conséquemment, il ne nous est pas difficile de nous laisser abandonner à ce scénario où ce qui se présentait d’abord comme une métaphore aura finalement des conséquences diégétiques réelles et fera évoluer le récit vers un dénouement inattendu.

À travers ce récit qui semble, dans les grandes lignes, universel et intem­porel, on verra poindre une critique délicate d’une société qui aurait intérêt à se rapprocher un peu de ses origines : on conseille par exemple à Sophie de « compter non pas des moutons – ils ne peuvent provoquer qu’un sommeil vulgaire – mais des voitures de luxe » (p. 337). La suite du récit dément cette croyance populaire, en prouvant qu’il faut parfois accepter la « vulgarité » pour accéder à un peu de légèreté.  [CJa]