À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Suzy, indiciblement dégoûtée par les hommes de son époque, tous plus puérils et mollassons les uns que les autres, les rejette en bloc. Sa révolte est telle que le Temps se fracture, lui conférant le pouvoir d’habiter le corps de femmes du passé. Suzy visite ainsi Jeanne d’Arc, Joséphine, Cléopâtre… Mais les hommes du passé la déçoivent tout autant. En voulant revenir au présent, elle aboutit dans l’avenir…
Commentaires
Ce texte est d’abord humoristique, le fantastique servant la drôlerie plutôt que d’être la raison première de l’histoire. Ce qui n’est nullement un tort, d’autant moins que le texte joue bien le jeu du genre. Même si le pouvoir de Suzy est justifié par une pirouette, il se comporte de façon à peu près cohérente : le texte ne trahit pas l’hypothèse sur laquelle il repose. L’auteur use du voyage temporel pour nous montrer avec un sourire en coin que les mâles de l’espèce qui ont marqué l’Histoire n’étaient pas pour autant des compagnons parfaits. Non plus que leurs partenaires, d’ailleurs. La quête de Suzy aurait des résonances encore plus satiriques à notre époque : Suzy cherche en effet un homme qui puisse aimer, tout en dominant sa compagne (au sens le plus neutre du terme, s’entend). Pas très politiquement correct ! Les visites dans le passé sont rondement menées, sans s’attarder trop pesamment à la reconstitution historique. Ce n’est certainement pas profond, mais au moins on n’a pas le temps de s’ennuyer.
La fin du texte catapulte Suzy dans un XXIIIe siècle édénique où, grâce à la parthénogénèse, les femmes se passent des hommes depuis 70 ans. Une conclusion qui assure une certaine symétrie, mais qui est assez faible à mon goût. S’agit-il d’un commentaire acide sur le rejet des hommes par les féministes du tournant des années 70, ou d’un simple retournement visant à surprendre/choquer ? Les femmes du futur vivent nues dans un grand jardin, allusion évidente au jardin d’Éden, mais comme c’est littéralement tout ce qu’on nous dit sur cet avenir, on ne peut quand même pas parler d’utopie féministe. « Homme, où es-tu ? » est un texte léger, fort lisible, mais pas marquant. [YM]
- Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 75-76.