À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Le capitaine Éric Sayan est envoyé sur la planète Circé par les autorités de la Fédération afin de capturer vivante Kallen Aguerra, une spécialiste géniale de la programmation imaginologique passée dans le camp des ennemis de la Révolution. L’officier s’aventure avec ses hommes dans les Jardins de l’Infante, guidé par un androïde pisteur qui détruit méthodiquement une à une les pièces de l’immense simulacre créé par Kallen. Arrivée à un village de primitifs, la troupe est attaquée par les Oyomèques et des vers géants qui subissent l’emprise psychique de la renégate. Profitant de la mort de la biologiste qui accompagne l’expédition pour prendre son apparence, Kallen provoque un ultime face-à-face avec Éric qui fut jadis son amant.
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Commentaires
Depuis quelques années, le nom d’Alain Bergeron figure régulièrement au sommaire des revues de SF. Comme il est un des meilleurs conteurs qui soit, ce retour est heureux. Rarement est-on déçu par ses textes.
« Les Jardins de l’Infante » s’inscrit au cœur de la thématique chère à l’auteur : les relations entre l’homme et la machine. L’entrevue qui suit cette novelette livre d’une certaine façon l’enjeu du texte : « La simulation rendra un jour impossible de définir l’humain. C’est le vieux rêve de l’intelligence artificielle. On aura atteint l’intelligence artificielle lorsqu’un observateur sera incapable de reconnaître si l’auteur d’une réaction est un humain ou une machine. »
« Les Jardins de l’Infante » actualise cette possibilité en opposant une artiste du simulacre à un androïde pisteur supérieur aux pisteurs humains. Sans être un texte de hard SF, la novelette fait une large place à la technologie. À la fin toutefois, les sentiments tenus jusque-là en marge du récit reprennent leurs droits. C’est le vieux fond d’amour qu’éprouve encore Kallen pour Éric qui empêchera ce dernier d’être contaminé par les larves d’orwabs (vers géants). Cette victoire in extremis de l’homme sur l’intelligence artificielle apparaît comme l’ultime stade qui permet encore de différencier l’humain de la machine.
Avec ses orwabs et son androïde Jon-As, la novelette d’Alain Bergeron se présente comme un mélange d’Alien et de Terminator, si l’on veut. L’auteur, qui laisse à d’autres les recherches formelles, vise la simplicité dans l’écriture. Toutefois, la psychologie des personnages me semble plutôt rudimentaire ici, contrairement aux autres nouvelles de Bergeron. La relation amoureuse qui, il y a dix ans, a uni Kallen et Éric manque de substance, ce qui est d’autant plus grave qu’elle doit justifier pourquoi le capitaine Sayan a survécu au contact physique de son ex-amante contaminée. Qu’est-ce qui a provoqué leur rupture passée ? Quels étaient les véritables sentiments de la jeune femme ? L’auteur est trop discret sur ce sujet.
Tout en étant plausible, cette fin paraît contredire l’esprit du texte comme si l’auteur ne pouvait se résoudre à envisager la fin de la suprématie de l’être humain. L’homme est dépassé sur le plan technologique par les machines qu’il a créées. Sa seule supériorité réside dans son humanité, dans sa capacité d’éprouver des sentiments. Mais pour combien de temps ? Alain Bergeron a sacrifié la logique du récit à ses prétentions humanistes. Mais peut-on lui reprocher décemment de ne pas déposer les armes, de continuer de croire en l’homme ? [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1991, Le Passeur, p. 24-25.