À propos de cette édition

Éditeur
CR-Yag
Genre
Science-fiction
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
182
Lieu
LaSalle
Année de parution
1992
Support
Papier

Résumé/Sommaire

2025 : une sonde envoyée sur Vénus indique que la planète est devenue habitable, au grand désarroi des scientifiques qui ne peuvent expliquer cet état de choses. Un équipage de huit personnes est envoyé enquêter, mais perd le contact avec la Terre… L’équipe de sauvetage ramènera un seul survivant, Jim Courtnel, qui semble avoir perdu la raison.

2050 : Bob Monroe, « héros mondial », délégué du gouvernement, s’entretient avec un Courtnel interné, qui lui prédit qu’il ira bientôt sur Vénus, où l’esprit du mal s’est incarné en un être appelé Kazar. Courtnel explique à Bob qu’il devra chercher la Muse Gabrielle et lui demander l’accès à la Source de Vie, seule arme utilisable contre Kazar.

Le gouvernement décide effectivement d’envoyer une nouvelle mission sur Vénus, car des observations récentes laissent croire à la présence d’extraterrestres nouvellement arrivés là-bas. Monroe en fait partie, avec sept autres hommes. Dès leur arrivée, les explorateurs rencontrent Déare, membre d’une race humanoïde amicale, qui les met en garde contre les suivants de Kazar, parmi lesquels on compte les terribles cavaliers noirs.

Guidés par Déare, les Terriens se rendent jusqu’à une forêt où ils rencontrent le Druide Azis, lequel leur expliquera comment libérer la Muse, tenue prisonnière au fond d’un lac. La Muse libérée, le groupe rencontre Kazar, qui n’est autre que Lucifer en personne, et qui heureusement ne peut les attaquer car ils sont encore dans les limites d’un jardin protégé par Dieu.

Hélas, il se révèle que la Source de Vie est sur le domaine de Kazar ; mais un passage secret permet d’y accéder, en franchissant sept portes, sept étapes de purification initiatique. À la dernière, Bob reçoit Dieu en lui.

Azis, Gabrielle, Déare et Bob/Dieu se rendent jusqu’à la Source de Vie. Après avoir bu le liquide sacré, Bob est capable de supporter la pleine incarnation divine. Dieu confronte ensuite Kazar dans son château, et malgré la puissance de Kazar et celle de sa sorcière préférée Achile, Dieu est vainqueur.

Mais, à leur retour sur Terre, on croit les explorateurs frappés de démence. Bob termine son histoire depuis un hôpital psychiatrique, dont il sait qu’il ne sortira jamais.

Commentaires

Première constatation : l’éditique permet de nos jours à des néophytes de produire un livre sans savoir, par exemple, que les répliques de dialogues s’indiquent par des tirets (—) et non des traits d’union (-) ; et sans avoir en fait le moindre sens de la mise en page. Kazar est un livre laid.

Deuxième constatation : si Kazar avait eu une présentation digne de sa qualité littéraire et science-fictionnelle, il aurait été griffonné au crayon de cire sur du papier-cul.

Soit, Kazar étant un « roman initiatique », le but du livre est essentiellement de livrer un message philosophique. On a fort à propos mis les apophtegmes de l’auteure en italiques gras, ce qui facilite le repérage visuel. Ma tâche de critique n’étant pas de discuter de philosophie en long et en large, je ne parlerai de Kazar qu’en tant que roman de SF, sauf pour noter que la vision du monde de l’auteure est résolument chrétienne, et même catholique, ce qui me paraît rare en ces temps de Nouvel Âge « post-religieux » – mais je ne suis pas très à la page en ésotérisme.

Quel que soit son succès en tant qu’outil spirituel, Kazar échoue lamentablement en tant que roman. Ginette Blais n’a visiblement aucune expérience d’écriture : elle ne sait pas comment on construit un livre. Combien y a-t-il de scènes inutiles, de dialogues stériles ? L’équilibre narratif est déficient, bien trop de poids étant donné à des scènes mineures, alors que la lutte climatique entre Dieu et Satan-Kazar n’accapare que cinq ou six pages.

Et le style ? Faux emplois à hurler (« je suis exécré » pour « excédé »), dérives sémantiques dans les métaphores (« Ses yeux verts deviennent rouges comme un rayon laser et transpercent ceux d’Azis »), maladresse pure et simple (« Ce qui semble être des mains est aussi ganté de noir, c’est incroyable »), confusion dès qu’une idée un peu complexe doit être exprimée (« Je m’agrippe à ces algues qui, sans le savoir, sont les cheveux de la Muse »), ainsi de suite pendant 182 pages.

Mais ce qui atteint à la catastrophe pure et simple, c’est l’incompétence scientifique totale de l’auteure. Déare apprendra à nos vaillants astronautes que les cavaliers noirs sont toujours de garde, sauf les soirs de pleine lune… Sur une planète qui ne possède pas de satellite naturel et dont la journée dure au-delà de deux cents jours terrestres. Mais de toute façon, pourquoi se formaliser de ces détails ? Ce n’est que de la science, bonne pour les scientifiques. Et les scientifiques, dans ce genre de roman, n’ont qu’une seule et unique fonction : celle de ne pas comprendre ; parce qu’il faut toujours asséner au lecteur cette vérité incontournable : il nous faut écouter notre intuition, la logique est dépassée.

C’est sans doute pourquoi, quand nos héros se posent sur une Vénus présumément habitée, sans s’être donné la peine d’effectuer de repérage depuis l’orbite, ils attendent toute une nuit avant de sortir de leur navette, en rampant pour ne pas être détectés… par des extraterrestres qu’ils présument avoir vingt mille ans d’avance technologique sur eux !

Je pourrais continuer, mais il faut s’arrêter quelque part. Quoique je m’en voudrais de ne pas mentionner les deux emprunts flagrants de l’auteure, soit les Cavaliers Noirs de Tolkien, flair surnaturel y compris, et… Panoramix, le druide de Goscinny ! Azis est en effet rencontré dans une scène qui est presque calquée sur un album d’Astérix, si ce n’est que la serpe d’Azis est capable de couper par mégarde une branche si lourde qu’elle en cloue deux hommes au sol…

Il va de soi que je n’ai rien compris. Sceptique, j’ai été confondu (comme le « réalisateur » du livre, Yvan Lafleur, le promet en page de garde) sans vouloir l’admettre, et c’est par pure mesquinerie que j’ai répandu mon fiel sur cette œuvre admirable. Pardonnez-moi, mon Dieu, d’avoir douté que Vous puissiez Vous incarner en un personnage aussi falot et inconséquent que Bob Monroe ; d’avoir trouvé cette quête spirituelle, en définitive, aussi niaise que gentillette ; et surtout, d’avoir souhaité que le « À suivre… » sur lequel se termine Kazar ne se concrétise jamais. [YM]

  • Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 27-29.