À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Un homme prend du poids sans que son apparence s’en trouve affectée. Il consulte des spécialistes qui se penchent avec intérêt sur son cas. En quelques mois, l’homme atteint la demi-tonne. Il n’arrive plus à bouger. Son corps se densifie, se pétrifie. L’hypothèse des minitrous noirs est émise : l’organisme absorberait des particules de l’air ambiant, particules non identifiées à ce jour. Aucun physicien n’arrive à renverser le processus. Un dimanche, le cœur de l’homme cesse de battre. Deux jours plus tard, le mort raconte sa sortie de l’immeuble, à l’aide d’une grue, et le plaisir recouvré de la légèreté.
Commentaires
C’est sous forme de journal que nous est livrée l’étrange histoire de ce personnage, ce qui constitue une énigme en soi. Car comment un homme victime de pétrification peut-il tenir un journal ? Comment un homme qui perd l’usage de ses membres et de la parole peut-il raconter son histoire, à la première personne, même au-delà de la mort ? À qui s’adresse-t-il ? Et dans quel but raconte-t-il son expérience avec une telle précision ?
La nouvelle part d’un principe qui défie les lois connues de la physique. Mais c’est avec légèreté et humour que l’auteur aborde le sujet. Le personnage se montre en effet beaucoup plus intrigué – et surtout incommodé – qu’angoissé par ce qui lui arrive. L’homme s’étonne d’abord du changement de poids chez lui alors que le miroir lui renvoie obstinément la même image de lui-même. Il cherche une explication. Mais force lui est d’admettre qu’il vit l’impossible. Suivent alors les consultations, les expériences et les hypothèses des astrophysiciens qui visent un Nobel. Le cas n’est-il pas magnifique ? Il leur faut trouver la cause des troubles gravitationnels. Et s’ils avaient enfin trouvé le graviton ? « Le graviton est une mystérieuse particule que nous pourchassons depuis des années. Le jour où nous la tiendrons, nous saurons enfin le poids de l’univers, et si tout se terminera par le big crunch ! » Chose certaine, notre héros finit en état d’apesanteur, au bout d’une grue, content d’avoir échappé au poids de la condition humaine.
« Légèreté », tirée du recueil Le Grand Respir, révèle un auteur de talent (un excellent conteur, qui rappelle le Roch Carrier de Jolis Deuils), à l’aise dans les territoires de l’insolite et du fantastique (le tiers du recueil), et maîtrisant l’ironie à souhait. Alain Roy aime jouer avec les paradoxes et il le fait avec intelligence et finesse. Il est à espérer qu’il multipliera ses incursions dans le genre. [RP]
- Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 150-151.