À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Alors qu’il a décidé de se lancer dans l’horticulture afin de meubler son temps de congé, l’agent Less Statt reçoit un appel urgent de son patron, Broun Yéhead : un dangereux individu, au curieux nom de Déheff, essaierait d’ouvrir une brèche temporelle, risquant par le fait même l’anéantissement de l’univers. D’après le CSF reçu, l’abject personnage rencontrerait bientôt le sage de La Croix, sur la planète Carfax. Hélas, Less Statt ne pourra qu’assister impuissant à la rencontre, et entendre l’incroyable prophétie du sage qui, sur le moment, ne dira rien à Less, mais qui, au fur et à mesure que sa mission se poursuit, se révélera d’une troublante clarté.
Finalement, après moult aventures qui amènent Less Statt sur une planète à vendre où il sera mêlé à l’étrange rébellion des fidèles de l’Amnésique, voici le héros face au Grand Conseil, puis seul avec Déheff dans un étrange univers aux sables mouvants. Et tout à coup, Déheff n’apparaît plus si dangereux à Less Statt, d’autant plus que l’autre semble si bien le connaître…
Commentaires
Difficile de résumer ce genre de textes où l’aventure est foisonnante et où chaque scène contient sa ration d’inside jokes ! Car cette longue nouvelle de Martin, la toute dernière à paraître dans le fanzine Temps Tôt dont il était le directeur-fondateur – autrement dit, le D.-F. –, se présente avant tout comme un long pastiche où, sous couvert d’une folle poursuite, l’auteur fera une récapitulation de cet épisode marquant de sa vie.
Pour les connaisseurs du milieu de la science-fiction et du fantastique québécois – et francophone –, les allusions seront constantes… et bien amenées. On aura droit à la planète Carfax – célèbre fanzine québécois de fantastique – où, à partir des paroles sibyllines du sage de La Croix – Pierre Lacroix, directeur de Carfax –, la mission de Less Statt prendra des allures de quête, quête qui aboutira dans un univers en forme de sablier, le logo même du fanzine Temps Tôt !
L’un des passages les plus mystérieux est justement celui où le sage parle. À un certain moment, il dit : « Emprunte le passage de la cascadeuse, puis répond à l’appel des sirènes. Tu traverseras alors l’enfer mauve, la peur au ventre, jusqu’au but ultime : le monde de la Terre creuse, où l’oiseau de Marduk, sur son aile, t’emportera. » Les fidèles lectrices et lecteurs du fanzine auront alors reconnu les titres de six fictions publiées dans Temps Tôt ; la suite des aventures de Less Statt reflétera évidemment cet itinéraire, ce qui, en soi, est un tour de force car pas une fois Martin ne se permet des invraisemblances ou des raccourcis !
La rencontre ultime entre Déheff et Less Statt, et le retour à la case départ, c’est-à-dire le potager de Statt où, cette fois, il ne reçoit pas l’appel urgent de Broun, montre à la fois la nostalgie de l’auteur, par rapport à cette partie de sa vie, et sa grande humilité en laissant croire qu’une fois terminée, l’aventure de Temps Tôt sera rapidement oubliée. Qu’il se détrompe : tout comme Carfax, Temps Tôt symbolisera toujours une étape importante de la littérature de l’imaginaire québécoise pour un grand nombre de créateurs, grand nombre dont je fais partie. Qu’il en soit ici remercié, tout comme pour cette nouvelle, fort plaisante au demeurant. [JPw]
- Source : L'ASFFQ 1997, Alire, p. 119-120.