À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Lia, une jeune fée, écrit un livre où elle relate une fête organisée pour sa grand-mère Élia. À la surprise de tous, sa tante Ziza profite de la célébration pour effectuer un tour de magie, tandis que la magie est réputée impossible en ce lieu. Lia apprend alors que Ziza a découvert un grimoire et une lettre de la sorcière qui avait caché le livre. Afin de perpétuer ses nouvelles connaissances, la tante ouvre alors une école de sorcellerie. Un lutin sème cependant la chicane en affirmant qu’il faut bannir ces femmes dangereuses avant qu’elles ne se débarrassent elles-mêmes des habitants du royaume. Le roi Tio fait aussitôt saisir le grimoire magique et fermer l’école.
Les sorcières quittent la ville, mais voilà que grand-mère Élia s’évanouit lors d’une séance du Grand Conseil. Un remède magique apporté en cachette par sa cousine Reza, la fille de Ziza, guérit la grand-mère qui affirme bien haut qu’après tout, la sorcellerie est peut-être une bonne chose, mettant ainsi fin à la querelle. Les sorcières sont dès lors invitées à revenir et à rouvrir l’école, mais leurs actes magiques seront surveillés. Élia confie à Lia que c’était le chagrin de ne pas trouver de solution qui causait sa faiblesse. Elle a ainsi pensé que si elle semblait retrouver ses forces grâce à la sorcellerie, la magie n’apparaîtrait plus comme un danger.
Lia termine alors l’écriture de son livre et le lance dans un trou pour qu’un humain qu’elle avait rencontré lors d’une première aventure puisse le lire. Il semble que ce soit de cette façon que son histoire soit parvenue jusqu’à nous, lecteurs !
Références
Ce roman destiné à la jeunesse dispense une heureuse fantaisie en se déroulant au royaume de Saugrenu, un lieu dont la capitale est Ficti. En cet endroit merveilleux peuplé de fées, de sorcières, de lutins et d’ogres, la magie s’avère toutefois impossible et stupéfiante. Les fées n’y ont d’ailleurs jamais entendu parler de baguettes magiques ! En ce sens, la mise en place d’un monde merveilleux peuplé d’êtres fabuleux, mais dénués de pouvoirs magiques, surprend et amuse. C’est notre monde qui semble merveilleux aux yeux de ces créatures et la narratrice pose en ce sens un regard ahuri sur notre monde. Elle incite à voir les choses sous un angle nouveau et s’étonne de notre réalité en affirmant qu’il s’agit d’« un monde inimaginable avec des zautos qui avancent toutes seules et des zavions qui volent en emportant plein de gens » (p. 8). Le genre merveilleux, tel que présenté, n’est donc pas complètement classique et compte une part de singularité.
Mettant l’emphase sur les caractéristiques propres à Saugrenu, Lia entreprend de décrire la vie et les événements de son monde par le biais d’une narration à la première personne au ton expressif et vivant. Elle fait état, à de nombreuses reprises, des animaux, des fruits ou des légumes composites qui semblent naturels aux habitants du royaume ; ainsi, elle nomme les « citronouilles », les « patapoires », les « crocochons » ou les « lapichiens » alors que les hommes ne deviennent autres que des « nus-mains ». Fort sympathiques, les mots inventés et les mots-valises colorent les propos et donnent davantage de consistance au monde inventé. L’histoire est aussi truffée de détails amusants et bien intégrés à l’ensemble qui donnent vie au royaume.
En ce lieu fantastique, la situation devient toutefois dramatique avec le départ forcé des sorcières et l’instance de guerre qu’elles font, à ce moment, régner sur le récit. La relation amour/haine des deux cousines, dont l’une est l’aînée de l’autre de deux jours, est également développée en filigrane, donnant une note réaliste à l’œuvre. Ainsi, la jalousie de Lia à l’égard de Reza pour l’amour et l’attention de la grand-mère sous-tend le récit. Allant au-delà d’un dénouement facile, cet aspect permet d’ailleurs d’offrir une finale plus touchante et plus complexe qu’une miraculeuse intervention de la magie en proposant une réconciliation des deux fillettes, mais aussi une révélation inattendue sur le contenu de la lettre découverte avec le grimoire magique.
Des illustrations comiques accompagnent le texte et permettent de retrouver les typiques personnages à gros nez de Philippe Béha. [SD]
- Source : L'ASFFQ 1995, Alire, p. 172-174.