À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Lors d’une épluchette de blé d’Inde, la mère Catherine y va de son histoire… Le meunier Joachim Crête et son engagé, Hubert Sauvageau, étaient plus portés sur la boisson que la religion. Or, un soir de Noël, ayant décidé de ne pas aller à la messe de minuit, voilà que le moulin arrête. Déjà fort éméchés, nos deux lurons vont voir ce qui se passe. Rien. Quelques minutes plus tard, nouvel arrêt, et toujours rien. Mais voilà que Sauvageau s’enfarge, que le fanal tombe et s’éteint. Dans le noir, Crête se dit qu’il est bien mieux d’aller se verser un autre verre plutôt que d’aider son engagé.
Alors qu’il est dans sa cambuse, un grand chien noir aux yeux flamboyants se profile dans l’embrasure de la porte. Crête est effrayé et la bête bondit sur lui. Juste avant de perdre connaissance, le meunier a le temps de la blesser à la tête. Lorsqu’il se réveille dans son lit, Sauvageau lui dit qu’il dort depuis deux jours. Avisant la blessure à l’oreille que l’engagé arbore, Crête lance un grand cri et tombe raide mort sur son oreiller.
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Commentaires
D’abord parue en 1899 en langue anglaise dans Christmas in French Canada sous le titre « The Loup Garou », cette nouvelle de Fréchette est typique de la manière de l’auteur. Utilisant abondamment le dialogue et la langue vernaculaire de l’époque, Fréchette insère dans une discussion ayant lieu pendant une épluchette de blé d’Inde un fait étrange dont aurait eu connaissance une relation du narrateur de l’événement.
De cette écriture vive et imagée qui pastiche la verve des conteurs traditionnels, Fréchette entrelace habilement deux éléments fantastiques du folklore afin de fignoler une histoire de loup-garou fort instructive. Il y a tout d’abord l’arrêt inexpliqué du moulin alors que sonne le dernier coup de cloche annonçant la messe de minuit, qui rappelle comment était importante la présence de tous à l’office de Noël. Puis il y a la transformation de Sauvageau et l’apparition devant le meunier du « grand chien noir, de la taille d’un homme, avec des crocs longs comme le doigt, assis sus son derrière, et qui le regardait avec des yeux étincelants comme des tisons ».
Mais dans ce texte sous-titré « conte de Noël », nous sommes loin de l’humain qui se transforme en effroyable bête à la pleine lune et qui ne peut être tué qu’avec une balle d’argent. Non, ici, la bête, pour effrayante qu’elle soit, a plutôt l’apparence d’un gros chien et c’est le non-respect de la convention religieuse qui en force la métamorphose. Par ailleurs, il suffit, selon la narratrice, qu’un objet pointu ou tranchant fasse jaillir le sang du loup-garou pour que la bête reprenne sur-le-champ la forme humaine.
Quant aux conséquences du non-respect des convenances, elles seront dramatiques car, outre la mort du meunier, la débâcle du printemps emportera le moulin. Ce qui n’empêchera pas les jeunes qui ont écouté l’histoire de la mère Catherine de ne prétendre croire qu’en la sorcellerie de l’amour… [JPw]
- Source : Le XIXe siècle fantastique en Amérique française, Alire, p. 84-85.