À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Au creux de l’Enfer, un diable sans-grade nommé Waka s’ennuie pour mourir. Son travail, qui consiste à torturer les damnés, ne lui procure plus de plaisir ; il veut retourner sur Terre. Qu’à cela ne tienne, le Seul et Unique Malin soi-même propose à Waka d’exaucer ses vœux en échange de considérations futures et de peines on ne peut plus actuelles. À quelque temps de là, Georges Vachon atteint les bas-fonds du désespoir parce que ses babines ultrapulpeuses le marginalisent, le privent même de toute vie sociale, de toute relation humaine. Quand le Malin autorisera son suppôt à s’emparer de l’enveloppe charnelle du mortel le plus désespéré, le hasard, assisté par un « Flaireur de Profond Désespoir », choisira nul autre que Georges Vachon. Mais attention, Waka ne s’engage pas à le rendre intact après usage quand il s’empare d’un corps, ce qui autorise bien quelques transformations, assez en tout cas pour faire de Georges-le-lippu une succube vorace que des légions d’hommes convoiteront.
Commentaires
Claude Bolduc illustre ici comment le Malin donne une leçon dans l’art de la diablerie à ses démons ; comment, pour bien servir les intérêts du Maître, il faut être prêt à tous les sacrifices, à mentir, à tromper, à trahir. Aussi, comment éviter de faire le malin avec le Malin, puisqu’on perd chaque fois qu’on joue à ce jeu, n’est-Il pas le seul malin à majuscule ? Ceux qui croient tirer un avantage de leur commerce avec Lui finissent toujours par se coltiner d’autres conséquences souvent fâcheuses, rarement prévues, jamais désirables.
L’auteur développe son récit de manière classique, dévoilant le minimum nécessaire, excitant la curiosité du lecteur sans le satisfaire jusqu’à la fin. Mais voilà, comme le sujet manque de consistance, Bolduc sent le besoin de compenser l’absence d’une intrigue forte par la vigueur et l’enthousiasme qu’il mettra à dépeindre les enfers respectifs de Waka et Georges.
Il est manifeste que l’auteur a pris un plaisir fou à écrire cette histoire. Il y laisse libre cours à son humour tongue-in-cheek, sa fantaisie et sa créativité s’y expriment en de nombreuses trouvailles amusantes. Dans l’opération cependant, il lui arrive de perdre l’objectif de vue. C’est alors que le rythme se relâche et que des longueurs viennent ralentir la narration. La nouvelle alterne ainsi les parties où l’action progresse beaucoup et celles où ça piétine. Ce mode narratif à deux temps concentré/décontracté engendre une disproportion dans les parties du récit. Et puis, s’il fallait en dire quelque chose, la fin de l’histoire tombe un peu à plat. En somme, l’intérêt premier de cette nouvelle réside dans le ton que Claude Bolduc lui a donné. [RG]
- Source : L'ASFFQ 1993, Alire, p. 27-28.