À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Jordan et Maxence assistent à la projection d’un film d’horreur quand la créature monstrueuse se matérialise dans la salle. C’est la panique. Les deux frères comprennent tout de suite que Quentin, le troisième membre des triplés, n’est pas loin. Les trois frangins ont un don qui fonctionne quand ils sont réunis et qu’ils éprouvent de l’effroi. La dernière fois que cela s’était produit, c’était il y a huit ans à la lecture à voix haute par leur mère du Spectre du mont Noir qu’ils viennent justement de voir au cinéma.
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La Malédiction des triplés met à profit un début intrigant et mystérieux à souhait qui tire les ficelles de l’horreur. L’auteur n’est pas sans connaître la popularité dont jouit ce genre chez les jeunes. Il aborde ici le thème de la matérialisation des êtres imaginaires et l’explique de façon amusante par le don qu’ont reçu les triplés à leur naissance. Quand ils sont ensemble dans une même pièce et qu’ils ont peur, ils sécrètent de l’adrénaline et ce qu’ils imaginent se concrétise.
Mine de rien, Louis Émond amorce là un débat toujours actuel. Il pose en effet la question très pertinente du choix des lectures pour les enfants : doit-on les exposer à des récits d’horreur ? « Ces histoires sont inutiles et font vivre des émotions dont on peut bien se garder » dit la mère. Et plus moraliste : « Les histoires sont faites pour élever l’âme, non pour l’avilir. » Ce à quoi répond fort sagement Jordan : « Comment pourrons-nous apprendre à former notre jugement si tu décides toujours tout à notre place ? » Match nul. Et puis, la peur ne fait-elle pas partie des émotions humaines ?
La nouvelle s’appuie sur une construction ambitieuse pour un texte de jeunesse avec retour dans le passé et récit enchâssé. De plus, elle comporte plusieurs niveaux de lecture. Ainsi, le texte dans le texte, le Spectre du mont Noir, contient un message écologique. L’esprit de la montagne s’incarne dans une créature monstrueuse parce que le nouveau propriétaire de la forêt et de la mine surexploite les ressources naturelles.
Dans l’ensemble, le texte est plutôt bien écrit mais on notera un non-sens dans la phrase suivante : « Dehors, le vent sifflait dans les arbres qui s’agrippaient à leurs dernières feuilles. » Et puis, que penser de cet attachement à une berceuse anglaise, These Foolish Things, alors que rien n’annonce cette anglophilie des triplés ? On ne sait rien de leur origine mais cette référence à un bagage culturel anglais surprend pour le moins.
La qualité des questions morale et sociale que soulève La Malédiction des triplés contribue néanmoins à la réussite de la nouvelle d’Émond. [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1998, Alire, p. 270-271.