À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Une femme est brûlée vive sur un bûcher pour cause de sorcellerie. Son esprit demeure sur les lieux du châtiment et observe les festivités entourant sa mort tout en jurant d’obtenir vengeance.
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Commentaires
Le nom de cette femme, c’est Manoua. Précisons tout de suite qu’il ne s’agit pas d’une erreur de notre part puisque avant de paraître dans les Contes pour buveurs attardés sous le titre de « Maouna », cette nouvelle, où Michel Tremblay semble puiser son inspiration du côté de Jean Ray, maître belge du macabre, s’intitulait bien « Maouna ». La modification a sans doute été opérée plus tard pour des raisons d’ordre poétique, le nom « Maouna » possédant une plus grande force incantatoire et une plus grande musicalité que « Manoua ». Ce changement a une raison d’être, car la nouvelle est plus poétique que strictement narrative ; quand on le lit à voix haute, le texte, où Manoua s’adresse directement à ceux qui l’ont tuée, ressemble à une incantation. Ce n’est pas une intrigue qui lui donne sens, mais bien ses harmonies, ses sonorités, ses images. C’est à travers elles que l’on découvre les états d’âme du personnage, sa force et sa colère (Manoua insiste sur son invincibilité et sur sa soif de vengeance en utilisant l’anaphore, la répétition et l’énumération), mais aussi, et c’est ce qui est le plus important, sa souffrance, sa fragilité, sa vulnérabilité, elle qui se complaît à dire qu’elle sera la maîtresse du monde, mais qui a « encore peur des araignées ».
Dans ce texte, donc, Michel Tremblay suggère beaucoup plus qu’il ne raconte la détresse de Manoua, mais cela est loin de nuire à la nouvelle qui y gagne au contraire un certain mystère et un grand pouvoir évocateur. Pas mal pour un auteur au tout début de la vingtaine au moment de composer cette histoire. [SN]
- Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 211-212.