À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Sur la planète Creuse, colonisée par les Terriens, la population autochtone est bizarre. Si l’on parle des « fridjis » au féminin, chaque individu(e) constitue pourtant un couple. Mais seule la moitié femelle communique volontiers avec les humains, par le truchement d’un « voc ». Le cerveau femelle du couple fridji est analytique, tandis que le masculin est mémorisateur. Cette symbiose amoureuse est si complète qu’un(e) fridji ne songe qu’à mourir lorsqu’elle (il) perd son compagnon (sa compagne).
Avec de nombreux scientifiques humains, douze ouvriers fridjis et son oncle Basmi, le jeune Lucian – quinze ans – fait partie d’une expédition dont le but consiste à explorer pour une première fois la mer de Creuse.
Quand l’équipage arrive là-bas, la partie masculine des fridjis refuse de collaborer entièrement avec les scientifiques. On comprend alors que les mâles possèdent un langage secret.
Dans la forêt proche de la mer, on trouvera ensuite de mystérieux campements fridjis dont on ignorait l’existence jusqu’à présent…
Commentaires
Le premier roman jeunesse d’un écrivain, et cela semble particulièrement vrai dans le cas de la SF, constitue souvent un récit initiatique. J’ignore pourquoi. Cela semble aller de soi – affaire d’intuition, semble-t-il, beaucoup plus que fruit des réflexions de l’auteur. Ainsi en était-il, par exemple, du premier roman de Francine Pelletier, Le Rendez-vous du désert, et du premier d’Esther Rochon, En hommage aux araignées (devenu plus tard l’Étranger sous la ville). La Mer au fond du monde de Joël Champetier ne brise pas cette habitude.
Joël Champetier n’est pas un nouveau venu en littérature québécoise de SF. Loin de là, serais-je tenté d’écrire. Il a déjà publié plusieurs textes qui ont été fort bien reçus dans le milieu, et c’était justice. Qu’en est-il donc de son premier livre ?
Eh bien, celui-ci m’a déçu et un peu attristé. Ayant lu quelques-unes de ses nouvelles antérieures, je savais être en droit de m’attendre à quelque chose de bon et d’abouti. Ce n’est pas tout à fait le cas, mais ce n’est surtout pas grave. Car le potentiel romanesque montré ici par Joël Champetier laisse présager quelques futures œuvres délicieuses. Malgré ses faiblesses, son texte est largement supérieur en qualité, et de loin, à la plupart des premiers romans.
Tant d’éléments sont présents dans ce livre, qui auraient pu en faire une œuvre excellente ! L’univers décrit est crédible de bout en bout. Idem pour la physiologie et les mœurs des fridjis. À aucun moment le récit ne souffre de flou ou de mollesse, défauts fréquents chez les nouveaux auteurs – les descriptions sont détaillées, le vocabulaire est précis, rien n’est escamoté par paresse ou manque de talent.
Un peu trop nombreux peut-être pour un roman de cette taille, les personnages se tiennent et ils sont intéressants. Enfin, le style de Champetier, net et efficace, est tout simplement remarquable de maturité. Certains passages, notamment celui décrivant la catastrophe naturelle, à la fin, sont superbes.
Cela fait donc beaucoup de qualités pour… un seul défaut.
Il s’agit toutefois d’un défaut majeur en littérature narrative et cela est encore plus vrai en littérature destinée à la jeunesse.
L’histoire, nom de Dieu ! L’histoire ! Joël Champetier ne nous offre un premier mystère que vers la moitié de son roman ! Et le premier véritable rebondissement, la première vraie surprise n’a lieu qu’aux deux tiers ! Seuls le début et la finale sont enlevants.
Le reste n’est pas sans intérêt, je l’ai dit, mais quelle déception de constater que, malgré tout le talent de l’auteur, le récit ne décolle pas ! Dès lors, l’intérêt du texte repose essentiellement sur la biologie et la culture fridjis que les héros continuent à découvrir contre toute attente. C’est bien, mais c’est mince…
Dommage. Je suis cependant persuadé que ce premier coup d’archet de Joël Champetier sera suivi de mélodies d’une richesse supérieure. [DC]
- Source : L'ASFFQ 1990, Le Passeur, p. 52-53.
Prix et mentions
Prix Boréal 1991 (Meilleur livre)
Références
- ––––––––––––––, Vie pédagogique 72, p. 29.
- Fournier, Sylvie, Lurelu, vol. 14, n˚ 1, p. 18.
- Le Brun, Claire, imagine… 57, p. 88-89.
- Vonarburg, Élisabeth, Solaris 95, p. 13.