À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Une veuve, mère d’une fillette appelée Célia, tient bed and breakfast depuis la mort de son mari. Lors d’une quasi-noyade à la piscine, Célia revoit brièvement, durant une expérience d’après-vie, le curieux monsieur Oddsong, un visiteur qui avait séjourné chez elles. Ce pasteur britannique aux vêtements désuets se disait professeur de mathématiques. Il s’était vite gagné l’amitié de Célia, malgré ses marottes et ses lubies – entre autres son grand amour des fillettes. Puis, après un séjour agréable, il avait quitté l’auberge à la suite d’une contrariété.
Avec sa fille, la narratrice visite une hypnotiseuse pour s’assurer que Célia ne fabulait pas. La psychologue, versée dans le paranormal, s’intéresse au cas du mystérieux Oddsong, présumé mort peu après son départ de l’auberge. C’est elle qui découvrira une photo de Charles Dodgson, alias Lewis Carroll, et qui supposera que le mathématicien, auteur de L’Autre Côté du miroir, avait découvert une formule permettant de voyager dans le temps sans machine. Amenée sous hypnose à revivre une existence antérieure, Célia s’avérera avoir été Alice Liddell, qui avait servi de modèle à l’écrivain.
Commentaires
L’écriture de Clément Fontaine est ici impeccable, mais la narration est par moments fastidieuse dans son maniérisme. À quelques détails et à quelques mots près (dans le langage des jeunes : « dégueu », « capoté », « supercontent »), le roman pourrait avoir été écrit il y a vingt ou trente ans. L’auteur confie sa narration à une dame mûre et pudibonde, traductrice obsédée par la question des langues officielles au Canada, avec une attitude très provinciale face à « la grande ville » qu’est Montréal. Traducteur lui-même, Fontaine va jusqu’à traduire entre parenthèses certains mots de la narration, tout en rédigeant en anglais seulement les passages révélant la possible pédophilie de Lewis Carroll !
Style vieillot, donc, narration au passé simple en « je » et en « nous », le roman offre des dialogues qui ont autant de naturel qu’un doublage français de film étatsunien des années soixante. Charles Oddsong, professeur, est le prétexte qui permet à l’auteur de nous dispenser son savoir varié (astronomie, prestidigitation, BD européenne), dans des propos à tonalité didactique.
Ces réserves mises à part, Merveilles au pays d’Alice est un bon roman, au thème inattendu dans le paysage québécois de la littérature jeunesse. Bien que prévisible pour un lecteur adulte, il parviendra à intéresser son public cible – sans peut-être, toutefois, le « tenir en haleine » comme l’avance le texte de la quatrième de couverture. Mais il y manque l’émotion – la nostalgie – qui se dégageait d’une œuvre comme Somewhere in Time, sans doute à cause d’une narration trop artificielle, trop détachée. La narratrice a beau nous répéter son attirance pour Oddsong, son désir d’accueillir d’éventuelles avances amoureuses, on ne ressent pas grand-chose pour ce pasteur, quadragénaire maniéré et pédant, et par conséquent on ne comprend ni ne partage les sentiments de la veuve – fort tempérés du reste. [DS]
- Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 78-79.
Références
- Anonyme, Littérature québécoise pour la jeunesse 1992, p. 29.
- Madore, Édith, Les 100 livres québécois pour la jeunesse qu'il faut lire, Québec, Nota bene, p. 182-184.
- Meynard, Yves, Lurelu, vol. 15, n˚ 3, p. 23.
- Pelletier, Francine, Solaris 101, p. 64.
- Sarfati, Sonia, La Presse, 29-03-1992, p. C 5.