À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Le détective John Steel est appelé en renfort par le chef de police de Konigshofen afin de résoudre une série de meurtres qui ont été commis aux abords de la forêt de Thuringe. Les pistes pointent vers le château de Gravenstein où vit en réclusion un mystérieux baron. Steel, accompagné du frère d’une des victimes, se rend au château. Il est accueilli avec affabilité par le baron mais ce dernier séquestre les deux hommes car il mène là des expériences secrètes qui intéressent le IIIe Reich. Steel découvre bientôt la vérité.
Commentaires
« Le Monstre de Gravenstein » fait partie d’une série policière en fascicule qui met en vedette le détective John Sylas Steel, de l’agence Bourne, à Londres. L’auteur se fait avare d’informations sur son héros, probablement parce qu’il s’agit ici du sixième numéro de la série et qu’il l’a déjà décrit dans les numéros précédents.
Quoiqu’il s’agisse à l’évidence d’une intrigue policière destinée à faire la lumière sur des meurtres mystérieux, l’enquête de Steel lève le voile sur les activités secrètes du baron Sigismund de Gravenstein dans son château isolé dans la forêt de Thuringe. Cette intrigue secondaire, de nature fantastique par les expériences en laboratoire que mène le baron, apparaît dès lors beaucoup plus intéressante et révélatrice de l’époque que la trame principale.
À partir d’une cellule vivante, le baron a créé une bête énorme, sans charpente osseuse et en pleine expansion, qu’il faut nourrir de chair et de sang. Cette expérience est suivie de près par le IIIe Reich qui a dépêché des soldats au château.
Cet arrière-plan historique et la date de publication du fascicule (8 avril 1941) renvoient directement à la Deuxième Guerre mondiale. Le monstre créé par le baron est une superbe métaphore du nazisme devenu une bête incontrôlable, en pleine expansion, qui réclame de plus en plus de chair et de sang, évocation des vies humaines sacrifiées sur les champs de bataille. Le Führer n’est jamais mentionné, c’est l’idéologie pernicieuse qui est dénoncée, incarnée par la bête. L’auteur a l’intelligence de ne pas condamner tous les Allemands. Sigismund de Gravenstein est un homme de science honnête, dépassé par sa création, qui se convainc qu’il faut s’en débarrasser. Mais n’est-il pas trop tard ? Bon nombre d’Allemands qui ont porté Hitler au pouvoir dans les années 1930 se sont sans doute posé la question au début de la guerre 39-45.
Il est plutôt étonnant de voir Emmanuel Desrosiers, auteur du roman de science-fiction La Fin de la Terre (1931), s’aventurer sur ce terrain de la littérature en fascicule. Cela nous révèle, à tout le moins, qu’il n’entretenait aucun préjugé envers la littérature populaire. [CJ]