À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
[1 FA ; 3 SF]
Ad Majorem Dei Gloriam, de Mario Tessier
Le Retour de M. Delamort, de Frédérick Durand
La Rose du désert, d'Yves Meynard
La Cité des Arts, de Marc Vaillancourt
Commentaires
Mission délicate pour un projet du genre que de s’afficher sans gêne comme “collectif de la relève” ; les anthologistes courent le risque d’être vus comme voulant représenter tous les aspects de la SF québécoise dans les années 90, ce qui est beaucoup demander à seulement quatre auteurs. Les jeunes auteurs sont nombreux, leurs voix sont diverses. Ce collectif illustre en raccourci cette diversité, en même temps qu’il démontre le chemin parcouru par la SF québécoise en une quinzaine d’années.
Un reproche souvent adressé à la SFQ est son manque de diversité, son attachement à l’introspection et aux considérations nombrilistes ; on l’a déjà décrite comme la littérature du solipsisme. L’absence de SF à intrigue, de véritable histoire, voilà une remarque fréquente à l’endroit de la SFQ des premières heures et qui se justifie encore pour certains auteurs « anciens » toujours actifs. Le présent collectif illustre par l’exemple le processus de diversification par lequel la SFQ a passé.
On remarque par exemple une présence accrue de l’élément technologique, dans les nouvelles de Mario Tessier, Yves Meynard et Marc Vaillancourt, sans pour autant qu’il devienne le moteur principal des textes. Par ailleurs, une intrigue soutenue, presque à rebondissements, caractérise trois des quatre nouvelles présentées ici (Durand, Meynard et Vaillancourt). Mais ces points communs ne doivent pas faire oublier l’individualité des quatre auteurs, qui ne sont finalement que la pointe de l’iceberg des jeunes loups qui talonnent déjà ces auteurs que l’on considérait hier encore comme la relève.
Et à ce titre, il est étonnant de voir le nom de Meynard au sommaire d’un tel projet, lui qui n’est déjà plus de la jeune relève et est passé si rapidement dans le peloton de tête de la « troisième vague » de la SFQ. Est-ce le résultat des difficultés rencontrées pour obtenir des textes, comme le décrit Claude J. Pelletier en introduction ? C’est en tout cas faire une relative injustice aux trois autres auteurs que de leur faire côtoyer un collègue qui a déjà acquis une sûreté de moyens et un imaginaire beaucoup plus personnel et typé. On reconnaît nettement la manière Meynard, à la limite du maniérisme par moments, ce qui n’est pas encore le cas des trois autres auteurs. Mais c’est peut-être aussi un impératif commercial que de mettre au sommaire un nom qui soit un tantinet connu.
Voilà donc un projet méritoire non seulement par ses intentions mais aussi par les résultats ; on pourra chipoter sur le niveau de réalisation de tel ou tel texte, sur le fait que la nouvelle de Durand est peut-être plus fantastique que SF, mais en quatre nouvelles on peut voir que l’étiquette « SF québécoise » couvre désormais une gamme de registres et de tentatives encore inespérés à l’époque glorieuse des premiers tâtonnements. [LP]
- Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 136-137.
Références
- Bolduc, Claude, Temps Tôt 23, p. 17-18.
- Cloutier, Georges Henri, Solaris 105, p. 60-61.
- Janelle, Claude, Lettres québécoises 70, p. 35-36.